A vous,
Vous ne m’avez peut-être jamais vue. Ou vous n’avez peut-être jamais fait attention à moi. Je suis cette anonyme que vous croisez chaque jour dans les couloirs, cette ombre qui vous effleure sans jamais se montrer.
Je suis la personne qui ramasse votre tasse de café vide, celle qui nettoie votre bureau et vide votre poubelle. Je vous entends vous plaindre de rester tard au bureau, mais je suis là encore plus tard que vous. Je fais partie de ces bureaux comme une âme en peine, comme un fantôme brisé qui hante ces lieux.
Et lorsque vous partez rejoindre votre femme et vos enfants, je reste comme un chien abandonné, à pleurer votre absence.
Je suis là sans que personne ne me voie, on me croise dans un regard comme si j’étais un meuble.
Vous m’avez dit un jour de sourire. Je me souviens de votre allure grandiose, vous aviez l’air si fier. Vous m’aviez adressé la parole grâce à une promotion. Aujourd’hui, c’est à peine si vous me dites bonjour.
J’aimerais que vous m’aperceviez encore, à l’ombre de la porte de votre bureau. Je suis là, tout près de vous. A vous soutenir sans vraiment que vous le sachiez, à vous apporter votre journal, votre café deux sucres et un peu de lait, à vous défroisser votre veste.
Aimez-moi.
Elle.