Hommage à Cesaria Evora au Cirque d’hiver



Il m’arrive d’être en avance aux concerts auxquels je vais. Il arrive que les personnes que je vais voir soient souvent en retard. Je suis venu écouter, peut être une dernière fois, ce que la bonne âme de feu Cesaria Evora pouvait me transmettre sur scène. Seul, on me place au premier rang, entouré d’un public âgé et familial. J’avoue avoir très peu l’habitude de ces concerts d’après-midi et de leur ambiance assez particulière, différente. 


Les musiciens entrent dans l’arène, ensemble, comme soudés: c’est l’orchestre de la Diva, celui qui a fait toutes ses tournées. Il se compose d’une section rythmique batterie, percussions, puis basse, piano, guitare, en accompagnement et violon et clarinette en solistes. À peine en scène, ils attaquent une instru enjouée que le clarinettiste ne tarde pas à faire décoller avec un solo enthousiaste. Puis, un autre morceau démarre et entre en scène une chanteuse assez douce et gracieuse, inconnue. À la fin de son titre, elle laisse sa place à un autre chanteur, aveugle, à la voix très claire et au style proche de Ben l’oncle Soul tirant vers le Stevie Wonder : je comprends alors qu’ils seront les choristes de la pléiades de ténors de la scène qui vont se succéder.

Téofilo Chantre entre en scène. Il était le compositeur attitré de Cesaria Evora. Son visage rond illuminé d’un grand sourire ne peut que vous donner l’envie de sourire à votre tour. Il joue une musique légère à l’image de « Fala Pa Fala« , assez rythmée; le public commence à bouger. Il semble être le parrain de la tournée. Il nous fait l’honneur d’interpréter trois titres, tout comme ceux qui vont le suivre. 

C’est au tour de Mayra Andrade la Cubaine de chauffer la piste, mais surtout le public avec ses deux premiers morceaux. Elle interprétera le troisième avec le Portugais Camané, chanteur de Fado emblématique. Mayra Andrade se retire; la section rythmique retournera aux coulisses une chanson plus tard, le temps de laisser Camané nous bercer au son du Fado, musique dont il est aujourd’hui l’une des figures emblématiques. 
Au moment où le public aperçoit Angélique Kidjo, des cris de joie envahissent la salle. Elle semble décider à embraser la salle et réussi avec brio. Entre deux morceaux, elle nous raconte une histoire vécue, entre elle et La diva aux pieds nus. Une histoire au sujet d’une bague offerte, de robes confectionnées à Paris. Ses remarques , très drôles et teintées d’un féminisme affirmé, font chaleureusement rire le public. Sur ce,’elle fait venir dans l’arène le grand Ismaël Lo avec qui, elle fait son dernier morceau. On ne peut qu’apprécier la qualité artistique de l’ensemble. Alors qu’ Angélique Kidjo salue le public, Ismaël Lo prend sa guitare et son harmonica, l’euphorie retombe, l’ambiance se fait plus douce, mais le son est très agréable. Il termine sa partie par l’interprétation de l’éternel « Petit Pays« .
Téofilo Chantre revient accompagner Ismaël Lo pour un dernier titre puis entonne « Fatalidad« , comme un symbole. Avant de repartir il murmure avec pudeur élégante quelques phrases en hommage à Cesaria. Il annonce ensuite celui que l’on appelle le maître du Swing, Bonga. L’euphorie amorcée précédemment par Angélique Kidjo resurgit : le public se met à chanter, crier, certains descendent des gradins pour danser.  Mêmes les personnes les plus âgées se mettent à danser en rythmée : Bonga semble presque surpris par ce succès multi-générationnel ! Il prend son dikanza et commence son « set ». Avant de clore sa prestation avec Sodade, il indique qu’il l’avait chanté avec Cesaria quelques fois en concert. Il ajoute quelques phrases d’hommage et se fait alors apostropher par un spectateur, il le reconnait : il se trouve qu’il est le confectionneur de son instrument, un échange informel entre les deux hommes s’en suit, sous le regard attentif de l’ensemble du public.
 À la fin, tout les artistes reviennent au centre de la piste pour une nouvelle version de Sodade dans laquelle chaque artiste, à tour de rôle, a pu seul, interpréter un couplet du magnifique morceau. L’ensemble des artistes quittent la scène. Le public crie au rappel et c’est au rythme endiablé du batteur accompagné du percussionniste que la scène se remplie de nouveau. Le cirque d’hiver se transforme en piste de danse où se mêlent artistes et personnes du public. Le confectionneur d’instrument ami de Bonga semble avoir tout prévu et sort de son sac une flûte traversière, ce qui ne manqua pas de surprendre les musiciens ! L’invité surprise s’avère être en réalité un sacré flûtiste connu sous le nom de Max Cilla aka le « Maître de la flûte traditionnelle » en Martinique. Contrairement à eux, je n’ai pas connu Cesaria Evora, mais je suis assez certain qu’elle aurait adoré cette soirée. Ce fut, vraiment, un très bel hommage à la Diva aux pieds nus.

 

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