Exile on main street, le meilleur album des Rolling Stones?

Pour un certain nombre de fans, le premier double album des Rolling Stones, enregistré en 1971 marque l’apogée de leur carrière. Il vient couronner plusieurs albums excellents à une période qui était un peu l’âge d’or du groupe anglais. C’est aussi un album dont l’histoire sulfureuse contribue à la renommée, notamment les conditions de son enregistrement, dans les caves de la villa Nellcote.

« Pourquoi Keith est-il si cool? Pour dire les choses comme elles sont, ce type n’en a rien à foutre. Tout ce qui est si important pour la plupart des individus sans visage ni couleur qui contrôlent le monde en dehors du rock ne le concernent en rien »

« A cette époque là, être jeune, c’était avant tout être en pleine confusion. A propos de tout. »

(extraits de Exile on main street, une saison en enfer avec les Rolling Stones, le livre de Robert Greenfield consacré à l’enregistrement du disque dans la villa Nellcote).

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En avril 1971, les Stones sont obligés de s’exiler fiscalement en France car la Couronne britannique leur réclame un arriéré d’impôts équivalent à 98% de leurs gains des 5 dernières années.
N’ayant pas d’autre alternative que de sortir un album et d’organiser une tournée aux USA pour renflouer les caisses et continuer à vivre sur un grand pied, les 5 bad boys se réfugient en France à l’issue d’une transaction financière avec la République (un genre de dessous de table pour avoir le droit de résider en France mais de ne pas y payer d’impôts sur les éventuels gains pendant la période).
La résidence de Keith Richard, la villa Nellcote est restée célèbre comme le lieu où fut enregistré l’album Exile on Main Street. La villa, où habitaient Keith Richard, sa famille, ses amis, les musiciens ayant collaboré à l’album, les habituels pique assiette et quelques dealers corses a été choisie comme lieu d’enregistrement faute d’une alternative valable dans le coin.

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Le livre de Peter Greenfield, écrit en 2005 à partir des témoignages des personnes ayant résidé à Nellcote pendant cet été révèle l’envers du décor : les dissensions entre Keith Richard et Mick Jagger, les enregistrements qui commençaient toujours en retard, étaient interrompus par les siestes de Keith, la drogue omniprésente, la difficulté pour Mick Taylor de faire sa place dans le groupe, les difficultés techniques pour transformer une vieille cave en studio d’enregistrement et la vie si particulière du plus grand groupe de rock du monde en exil dans un immense palais.
Si beaucoup a été écrit sur cet album et sa genèse, le livre de Greenfield en offre une lecture plutôt sombre et glauque et surtout minimise l’importance de cette période dans la construction de l’album puisque, sur les 18 chansons de la version finale, un bon tiers avait été enregistré avant. C’est tout de même hallucinant d’avoir réussi à sortir un si bon album dans d’aussi mauvaises conditions, peu de groupes de rock en sont capables…

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En érudit du rock doublé d’un excellent conteur, Greenfield livre donc un excellent bouquin ni trop érudit, ni trop long sur la genèse d’un album des Stones à une époque charnière du rock (les Stones sont au top, la drogue commence à faire des ravages, les idéalistes des années 60 doivent choisir entre vieillir ou mourir) et ce livre est autant l’histoire d’un album que l’histoire d’une génération qui doit passer à l’âge adulte avec la gueule de bois (se marier, avoir des enfants, payer des impôts)…Le livre est publié par l’éditeur Le Mot et le Reste, qui propose plein de bouquins super sympa sur la musique. Le livre de Peter Greenfield sur le site de Le mot et le reste.

La pochette du disque est un patchwork de photographies prises par le photographe et ami des Stones, Robert Franck, auquel ils confieront la réalisation du film de la tournée STP de 1972 (le sulfureux Cocksucker Blues, jamais sorti car jamais « validé » par le groupe, il est visible sur Dailymotion: Cocksucker Blues sur Dailymotion).

Quant au contenu, c’est une explosion de sensations. L’album ne compte aucun vrai tube (à part le single Tumbling Dice) mais tous les morceaux ont une âme. Et ils donnent l’impression (fausse, en réalité), de l’album enregistré à la cool entre potes. Je te mets un extrait, parce qu’il fallait bien en choisir un, mais tout le reste est au top, c’est vraiment le disque à mettre entre toutes les mains, celui par lequel on redécouvre les Stones pour sortir des best off entendus mille fois, des chansons qui passent en boucle sur RTL 2, en boite de nuit, ou que les Stones jouent à chacun de leurs concerts.

En conclusion, je citerai cet article que Slate.fr a publié pour les 70 ans de Mick Jagger et que je trouve excellent: « Au cours de leurs 25 premières années d’existence, les Stones ont sorti 21 albums contenant du matériel original. Au cours des 25 années suivantes, ils en ont enregistré quatre. Les Rolling Stones ont donc passé la deuxième moitié de ces cinquante dernières années à effectuer un lucratif numéro d’autopromotion, sont passés maîtres dans l’art du remastering de luxe et dans la vente de leur légende, sous toutes ses formes. » (l’article complet)… dans la légende des Stones, Exile occupe une place de choix…

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