Mes meilleurs copains : Film générationnel

Mes meilleurs copains est un film générationnel. C’est à dire le film « bandes de potes » référence pour la génération qui était en âge de l’apprécier dans les années 90.

Vous me direz, ça fait beaucoup de monde. Alors je vais être plus précis. C’est le film référence pour la génération qui avait entre 17 et 25 ans dans les années 90 et qui était avide de films références à mater en boucle, de films dont on s’échange les dialogues d’un air entendu entre potes / complices. Comme « La folle journée de Ferris Bueler » ou « les bronzés font du ski » pour la génération 80. La raison du succès tardif de ce film semi-autobiographique de Jean-Marie Poiré, outre cette aspect identitaire, c’est que c’est une excellente comédie de situation et de dialogues, avec un scénario bien foutu, des répliques ciselées et un casting aux petits oignons.

Quiconque a découvert Jean-Pierre Darroussin dans le rôle de Dany a beaucoup de mal à ne pas croire que ce comédien est une espèce d’allumé qui a pris un acide de trop et n’est jamais redescendu (tout comme FF Coppola était persuadé que Leonardo di Caprio était vraiment un attardé mental après avoir vu Gilbert Grape)…et c’est quand on le voit campant d’autres personnages, comme le frangin dans « Cuisine et dépendance » ou plus récemment le directeur adjoint de la DGSE dans la série d’Eric Rochant « le bureau des légendes » qu’on prend conscience du talent de comédien du gars.

Sorti en 1989, il fait un quasi bide en salle, et ce n’est qu’au milieu des années 90 que sa sortie vidéo le révèle vraiment au public. Il devient le film des soirées d’ados. Celui qu’on regarde en faisant tourner une flask de Label 5 et trois bières tièdes. Celui devant lequel on tente vainement de peloter sa voisine un peu godiche.

mes meilleurs copains

C’est Jean-Michel (Christian Clavier) qui raconte une histoire. Celle de lui et ses trois amis d’enfance, Guido (Jean-Pierre Bacry) et Richard (Gérard Lanvin) et Antoine (Philippe Korsand). Leurs premières conneries de lycéen, les premiers conflits avec les parents, jusqu’à une soirée d’ado un peu trop borderline qui fait exploser le trio. On retrouve les amis quelques années plus tard, en plein cœur des années 70 où s’est joint au trio Dany, un musicien génial et complètement barré « c’était un guitariste hors pair. Il avait appris à jouer du cithare à Pondichery dans un ashram. Il avait acquis là-bas une sérénité orientale formidablement peu en accord avec le fonctionnement de notre société. » Ainsi que la belle Bernadette (Louise Portal), qui fait tourner les têtes de tout le groupe. La petite troupe vit dans un squatt, rue de Lappe où elle développe différentes forme d’expression artistique autour du théâtre de rue. C’est les années peace and love, avec l’herbe qui fait rigoler et la musique cool…comme dans ce passage des retrouvailles de Guido avec toute la bande qui est une mine de répliques culte…

On est entre artistes, et assez rapidement la petite bande se tourne vers la musique « c’était en septembre 72. Antoine, toujours très en phase avec l’évolution de la société, avait pensé que la pop music était beaucoup plus à même de faire bouger les masses populaires que la théatralité. Nous nous appelions désormais Gangrène Plastique et nous étions prêts à déboulonner Led Zep, Zappa, Jethro Tull et tous les autres ». Mais que ce soit sur les planches ou derrière un manche, l’expression artistique du gang n’est que la toile de fonds de drames plus intimes. Car la belle Bernadette, officiellement en couple avec le protecteur et jaloux Antoine est convoitée par Richard, le dragueur de la bande, et Jean-Michel, le timide langoureux. Guido quant à lui est totalement homo, quant à Dany, on ne sait pas trop. Dans le triangle amoureux qui s’installe, l’art n’a que peu de place! C’est pourtant par la musique que le groupe explose. Bernadette est repérée par un producteur québecois qui lui propose une carrière solo et l’emmène avec lui aux Etats-Unis.

mes meilleurs copains

Vingt ans plus tard, que reste-t-il de cette épopée sans pareil? Antoine est toujours réalisateur et jaloux compulsif « je me demande si ça serait pas beaucoup plus simple si j’étais homosexuel », Guido est un homo abstinent (on est en plein dans les années SIDA), Richard un entrepreneur embourgeoisé « toi de toute façon t’as viré à droite depuis que t’as du pognon » et Jean-Michel devenu dentiste « au fond, c’est assez passionnant une dent », écrit un roman qui ressemble beaucoup à l’histoire de sa bande de potes dans les années 70 (même s’il s’en défend). Après un concert de Bernadette auquel ils ont tous assisté, la bande de copains se retrouve dans la maison de Richard, avec Bernadette, pour un weekend souvenir où les plaies se rouvrent, les comptes se règlent et les coups pas tirés se tirent.

Mais la force du film, c’est que les histoires passées et présentes sont imbriquées, donnant au propos un rythme propre qui fait passer ses deux heures comme un rêve. Ainsi bien sûr que le rôle du narrateur, pas du tout objectif qui fait ressortir les angles saillants et souligne les caractères. Au final, Poiré aurait détesté le film….c’est bien le seul.

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