Les Rougon Macquart #4 La conquête de Plassans

La conquête de Plassans est le quatrième volet de la saga des Rougon-Macquart. Le roman nous ramène à Plassans, la provinciale et provençale préfecture d’ou sont originaire les Rougon et les Macquart.

Retour aux sources pour le quatrième volet de la série. Un volet qui aborde un sujet politique intéressant : l’utilisation de l’influence de l’Eglise par le pouvoir pour infléchir les votes en faveur du candidat de la majorité. Une critique au vitriol, servie par un casting bien dégueulasse, pour un belle fable sur la bourgeoisie provinciale que ne renieraient pas Claude Chabrol ou Luis Bunuel.

Le Lieu

Plassans est une ronronnante sous-préfecture provençale. C’est une ville imaginaire que Zola a inventée pour servir de creuset à la famille de sa saga sans se contraindre avec les limites d’une vraie ville. On considère généralement que Plassans est inspirée d’Aix En Provence, dont l’écrivain était originaire (on comprend alors qu’il n’ait pas voulu vexer les locaux en dépeignant leur riante cité comme il savait si bien le faire). Mais Plassans pourrait aussi bien évoquer toutes les sous-préfectures de France, tant au niveau de la construction des quartiers que de leur population. On a un vieux quartier occupé par une noblesse un peu décatie qui rêve au retour du Roi en vivant dans un entre-soi de bon aloi. On a un quartier moderne occupé par la bourgeoisie et la noblesse d’Empire. C’est là que les fonctionnaires cohabitent avec les capitaines d’industrie, les rentiers et les prélats. Enfin, on a un quartier ouvrier pour les pauvres. Dans La fortune des Rougon, l’action était répartie entre les quartiers bourgeois et ouvrier. Dans la Conquête de Plassans, on ne quitte pas le premier quartier, et plus particulièrement la maison des Mouret, épicentre de l’histoire.

Les Personnages

La conquête de Plassans présentent plusieurs personnages qu’on retrouve ensuite dans d’autres épisodes. C’est de la famille de François Mouret et Marthe Rougon qu’il est ici question. Marthe est la fille aînée de Pierre Rougon et Felicité Puech et la sœur cadette de Pascal, Eugène et Aristide. On a déjà rencontré les garçons dans les précédents volets mais les Marthe et sa jeune sœur Sidonie n’ont pas été présentées. Marthe a épousé très tôt son cousin François Mouret (Un cousin de la branche Macquart) et ensemble, ils ont fait leur beurre dans l’huile d’olives, à Marseille, avant de venir prendre une retraite paisible à Plassans pour élever leurs trois enfants, Octave, Serge et Desirée.
Petite liste des romans où on retrouve certains personnages :
Eugène Rougon => Son excellence Eugène Rougon
Aristide Rougon => La curée
Pascal Rougon => La faute de l’abbé Mouret et le Docteur Pascal
Octave Mouret => Pot-Bouille et Au Bonheur des Dames
Serge et Désirée Mouret => La faute de l’abbé Mouret

A cette belle brochette de Rougon-Macquart vient se greffer un détonateur, l’abbé Faugeas. Un curé un peu fanatique / habité qui vient à Plassans et s’installe en pension chez les Mouret.

la conquete de Plassans

Le contexte historique

La ville de Plassans, acquise à la cause impériale grâce aux intrigues des Rougon (voir La Fortune des Rougon) a basculé côté légitimiste (les royalistes donc) aux dernières élections législatives. Il faut absolument résoudre ce problème qui fait un peu tâche, pour la circonscription d’un ministre d’empire (voir Son Excellence Eugène Rougon). Ledit Eugène profite donc qu’il est ministre de l’intérieur et des cultes pour recruter un prêtre marron et passablement grillé et le convaincre d’aller reconquérir les ouailles de Plassans en échange d’une cure prestigieuse.

la conquete de Plassans

Tout est en place, le rideau se lève sur

La famille Mouret s’est installée dans la belle cité de Plassans pour une retraite bien méritée. François Mouret, sa femme Marthe et leurs trois enfants (adolescents) coulent des jours heureux et sans heurts, bercé par un train train langoureux. Papa jardine, maman fait de la broderie, on dîne en famille, on ne fait pas de politique. Les Mouret sont installés dans une grande maison qui voisine d’un côté les jardins de la sous-préfecture où la société pro-empire se réunit, de l’autre des grands bourgeois locaux qui sont très amis avec les prélats. Tout va tranquillou jusqu’au jour où François décide de sous-louer son étage à un prêtre arrivant en ville, l’abbé Faugeas. Vêtu d’une soutane mitée, accompagné de sa mère et portant toute sa fortune dans une grosse malle, le prêtre débarque à l’improviste et prend possession des lieux. Au début il reste cloîtré dans sa chambre, sort en rasant les murs et semble vivre de prières, ce qui intrigue François qui cherche à tout prix à en savoir plus sur son nouveau locataire. Alors un jour, on finit par inviter la mère la conquete de Plassanset le fils à la veillée du soir, maman joue aux carte avec François pendant que l’abbé sympathise avec Marthe….petit à petit, la famille Faugeas grignote de la place dans la famille Mouret, tandis que l’abbé se fait accepter par les bigots (et surtout les bigotes) de Plassans. Marthe, pourtant peu pratiquante, devient la plus férue des bigotes, espérant trouver dans la religion une passion qu’elle n’a pas connue dans son couple. Les enfants quittent un à un le nid, François se retrouve isolé et après que sa femme ait été prise de crises mystiques où elle s’auto-mutile, on accuse opportunément le brave homme qui se laisse enfermer dans l’asile d’aliénés où sa mère est elle-même internée depuis plusieurs années. La famille Faugeas s’est agrandie, l’abbé ayant laissé sa sœur et son beau-frère élire domicile dans la maison des Mouret, et puisque désormais il n’y a plus que Marthe, les locataires prennent peu à peu la place des occupants.

Pendant ce temps, l’abbé conseillé par Félicité Rougon conquiert toutes les sociétés qui comptent à Plassans, finit par faire élire le bon candidat et devient le curé qui compte à Plassans.
Mais un beau soir, François Mouret parvient à s’échapper de l’asile, il revient à la maison et y met le feu. Il meurt dans l’incendie qui emporte toute la famille Faugeas avec lui….
Mais Marthe, réfugiée chez sa mère, agonise de son côté, terrassée par la phtisie. Elle rend l’âme en voyant entrer une soutane dans sa chambre, pensant que c’est celle de l’abbé Faugeas alors que ce n’est que son fils, Serge, sorti du séminaire pour aller à son chevet.

Le lien du sang

Dans la conquête de Plassans, le trait héréditaire qui est mis en avant, c’est la folie. C’est la folie qui a conduit l’aieule Adélaïde au cabanon, c’est la même folie qui s’empare de François et Marthe, deux cousins réunis dans une union bâtie sur du vide. François devient fou d’oisiveté et de jalousie, Marthe devient folle de religion….deux maux, une même conclusion.

La cerise sur le gâteau

La force du récit repose sur ses zones d’ombre. L’abbé Faugeas est-il un imposteur ou un vrai fanatique prêt à tout pour le salut des âmes ? Quelle importance accorde-t-il à la religion ? Qu’est-ce que Marthe attend de lui ? La scène d’apogée où Marthe confronte l’abbé pour lui avouer qu’elle l’aime et qu’elle s’est prêtée à cette passion religieuse par amour est un moment assez délectable, on se croirait dans le Tartuffe tellement c’est bien joué….à moins que le prêtre ne soit sincère ?

la conquete de Plassans

ps : les images « faux berger » sont extraites de l’excellent jeu Bioshock Infinity.

1 Comment

  • Morgane
    Morgane

    Pour une petite info en sus…et parce que l’anecdote est sympathique.
    Je viens d’un petit village provençal appelé Flassans , dans laquelle se trouve d’ailleurs une vieille famille du coin du nom de « Rougon » , cela étant , c’est un nom courant par ici.
    On raconte d’ailleurs au village, que monsieur Zola avait ses habitudes dans le coin, à 1h d’Aix en Provence, au coeur du Var…

    A bon entendeur ^^

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