Le biopic de NTM sera à Cannes : le rap français enfin « validé » au ciné ?

La sélection cannoise vient de s’étoffer avec Suprêmes, l’un des films français les plus attendus du moment.

Tout juste après le podcast de Joey Starr en Featuring, on reparle du groupe de rap fondateur. Comme Julien, je ne suis pas fan de Joey ni de Kool Shen, mais force est de constater que leur postérité est indéniable. Bon nombre de leurs morceaux sont devenus cultes et l’influence de NTM dépasse largement le monde musical.

Voici le synopsis du film consacré à leurs débuts, interprété par Théo Christine (Skam, La Dernière Vague) et Sandor Funtek (il jouait le meilleur ami d’Adèle dans La Vie d’Adèle) : en 1989, le mouvement hip-hop vient d’arriver en France. Une bande de copains de Seine-Saint-Denis en profite pour exprimer la colère et le désarroi des jeunes des cités. Le premier album de Suprême NTM, Authentik, sortira 2 ans plus tard, suivi de leur premier Zénith.

Le rap français a une longue histoire en commun avec le 7e art. Il commence à s’inviter en 1995 dans des œuvres « état des lieux » des banlieues. En premier, le film du même nom réalisé par Jean-François Richet. Puis, deux semaines plus tard déboule dans les salles La Haine, film devenu culte et qui jouira d’un plus grand succès critique et public. Même si je trouve qu’il s’agit plutôt d’un film « punk », mais passons.

Fin des années 90 : le rap est désormais ancré dans la culture populaire française. J’en veux pour preuve le triomphe du film Taxi et sa B.O. signée Akhenaton qui sera nommée aux César. Le rappeur du groupe IAM passe lui-même derrière la caméra en 2000 avec Comme un aimant. Le film ne rencontre pas un vif succès, mais son titre Belsunce Breakdown aura au moins fait bouger tout le monde.

Dans les années 2000, Stomy Bugsy devient le premier rappeur à connaître simultanément le succès dans les charts et au cinéma (Le Boulet, Gomez et Tavarès). Oui, c’est un peu notre Will Smith à nous. De là à dire que le rap français devient mainstream, il n’y a qu’un pas. Le bling remplace la hargne, la haine devient toc. Si un film devait symboliser ce nouvel état des lieux, c’est peut-être ironiquement Fatal de Michaël Youn, sorti en 2010.

Dans la dernière décennie, le grand public aura une image partagée du rap made in chez nous : entre spleen chez PNL et clash chez Booba. En parallèle, les rappeurs investissent de plus en plus les cinémas : après Akhenaton, ce sont ainsi Orelsan, Kery James, Abd Al Malik ou le slameur Grand Corps Malade qui font leurs débuts à la mise en scène. Sur l’écran, Nekfeu tourne avec Catherine Deneuve, Roméo Elvis avec Quentin Dupieux et Joey Starr est nommé aux César.

NTM

En ce début des années 2020, comme une boucle qui se referme enfin, voici donc Suprêmes : la première fiction française sur d’authentiques rappeurs. Si Dans Tes Rêves avec Disiz en 2005 était notre 8 Mile, ce film-là sera notre NWA: Straight Outta Compton. Il était temps, et on est d’autant plus curieux car la mise en scène est assurée par Audrey Estrougo. En 2007, la jeune réalisatrice d’alors 24 ans sortait son premier film : Regarde-moi (Ain’t Scared). Il est hélas passé assez inaperçu et souffrait d’un rythme inégal. Pourtant, au cinéma j’étais assez bluffé : la réalisation fourmillait d’idées et les jeunes comédiens étaient plein d’énergie (notamment Eye Haïdara, vue plus tard dans Le Sens de la Fête). Ça vaut le coup de le rattraper en V.O.D., et si vous voulez continuer à faire rimer rap et ciné, je vous conseille la lecture du numéro spécial chez nos amis de Sofilm.

Suprêmes sera présenté en séance de minuit au Festival de Cannes. Il sortira en salles le 24 novembre.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *