La bourse ou un bon bouquin

« Est-on toujours tourmentée quand on est amoureuse? Amoureuse? Il vaudrait mieux dire possédée envahie, décolorée, recolorée à ses couleurs à lui. La quête d’un mot exact l’apaise. Elle goûte sur ses lèvres la trace de leur dernier baiser et se rassure. On ne mime pas le désir, le désir d’un homme qui se pose sur une femme et la rend belle. De ce désir-là, elle se sent parée. La façon qu’il a de refermer ses bras sur elle quand ils sont étendus dans le lit… Il l’étreint, l’ajuste contre lui et tout semble simple. Un baiser et les questions s’effacent, gommées par une évidence qui s’impose, embrasse-moi, embrasse moi encore. La volupté peut se révéler une science exacte, même si elle ne l’est que l’espace d’une heure, d’une nuit. Il est des confidences que seuls les corps échangent. Un accord secret signé d’une peau sur l’autre. »ACH003433123_1389652805_580x580

 

Nous retrouvons les personnages de la trilogie phare de Katherine Pancol (« Les yeux jaunes des crocodiles », « la valse lente des tortues », « les écureuils de Central Park sont tristes de lundi ») qui viennent nous présenter en début de récit un nouveau personnage, Stella. Ils nous donnent des nouvelles, puis nous laissent entre les mains d’une jeune femme qui se bat depuis toute petite pour sauver sa mère battue et humiliée par son père, alors qu’elle-même en a été et en est toujours la victime.

 

Ce roman, qui dénonce une situation encore bien courante de nos jours, et dont on apprend grâce à une note de l’auteur en fin d’ouvrage qu’elle en a été elle-même témoin dans toute son impuissance, ne stigmatise pas les « méchants » dans leur rôle de méchant. Bien au contraire, Pancol nous raconte ce qui fait que les « méchants » le devenus, et ce qui fait que les « lâches » – ceux qui savent mais ne disent rien – gardent les faits sous silence. La fin nous laisse tellement pantois qu’on se doute qu’il y aura une suite, et en cherchant moins d’une minute sur internet, l’on découvre que deux autres opus sortiront respectivement en avril et en juin de cette année.

 

Pendant mon adolescence, j’avais lu « Scarlett, si possible » et mon bonheur en avait été intense dans tout ce que ce livre parlait à l’adolescente que j’étais alors, avec tous ses rêves et ses ambitions pour l’avenir – en gros, j’étais nunuche. Plus tard, alors étudiante, j’ai dévoré la trilogie, mais je l’admets, un peu plus secrètement. Je savais alors quelle idée on se faisait de la « grande littérature » et à quel point, même si ces livres me faisaient du bien par leur légèreté, ils n’en faisaient pas partie.

Il faut bien admettre tout de même que lire du Pancol, ce n’est pas lire du Musso (bouh ! Musso ! Ces comparaisons commencent à lasser…). L’écrivaine manie bien les mots, les intrigues, même si parfois on tombe un peu dans le larmoyant, la facilité et même le grotesque (pour ceux qui connaissent, pensez à Junior, le bébé surdoué…).

En d’autres termes, on peut dire que les romans de l’auteur sont des bouquins de midinette. J’ai eu honte de les lire pendant un moment, mais aujourd’hui je l’assume, d’une part parce que je suis capable de lire autant de la grosse littérature qui fait mal aux yeux et au cerveau et de m’en délecter, et puis à d’autres périodes, j’ai besoin de facilité et de rêve (Ainsi donc, même si je n’aime pas Musso, je peux évidemment comprendre son succès : des fois, on veut juste se faire du bien, le débat est clos).

 

Je le redis, j’aime Katherine Pancol, j’aime ses livres, et je les range désormais dans ma bibliothèque à coté des Boulgakov, Toussaint et autres Lessing sans honte aucune. Mais là, dans le cas de « Muchachas », ça ne passe pas.

D’une part, j’ai eu l’espoir qu’on me parle à nouveau d’Hortense et de Joséphine, personnages, je l’ai dit, de ma trilogie chérie et ça n’a pas été le cas (j’ai attendu tout le roman), et d’autre part, je n’ai pas réussi à me passionner pour l’histoire d’une fille qui veut devenir forte pour sauver sa mère. Le sujet est trop facile et en même temps trop dangereux, l’écriture niaise et nombriliste.

 

Ma déception à touché à son comble lorsque, lassée du manque de profondeur de l’ouvrage j’ai découvert qu’il y aurait au moins une suite, et puis non, en fait deux, à deux mois d’intervalle. Autrement dit, les bouquins sont prêts à être mis en vente.

 

J’imagine, sans avoir lu la suite, qu’il aurait été intelligent de retravailler le texte pour le raccourcir et en même temps lui faire gagner en intensité. Au lieu de ça – le roman fait quasiment 20 balles – on compte sur le réseau de fans maintenant bien constitué, Katherine Pancol sait y faire – et dont je faisais partie, j’ai acheté mon livre le jour de la sortie, impatiente et stupide que je suis – pour acheter les deux autres. Et bien oui, rendre un récit meilleur en le condensant, c’est supprimer les autres opus et perdre presque 40 balles pour la suite.

Quand je sens ce genre de manigances matérielles de la part d’un auteur et de sa maison d’édition, je suis désolée, ça me révulse. On écrit plus pour dire quelque chose, mais pour ramasser les plus de pognon possible. Surtout que je sais d’expérience que Pancol sait mieux faire.

 

Les auteurs contemporains finiront-ils donc tous par me décevoir ?

 

Titre : Muchachas

Auteur : Katherine Pancol

Editeur : Albin Michel

ISBN : 978 2226 254443

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