CHEMS, le dernier Zarca : Drogue, orgasmes multiples et dépendance.

Chems de Johann Zarca

Après avoir obtenu le prix flore en 2017 pour « Paname Underground », Johann Zarca et son dernier roman étaient très attendus. Cet écrivain autodidacte et atypique avait su séduire un large éventail de lecteurs, friands de son phrasé argotique et urbain. Moi-même étant plutôt fan des anti-héros ainsi que des livres mi-fiction mi-enquête immersive, j’étais assez impatient. « Chems » est sorti en février et je me suis précipité pour l’acheter.

LE PITCH

Zède est un écrivain et un journaliste très spécial. C’est un habitué des enquêtes dans le milieu underground parisien. Lorsqu’il entend parler du Chemsex, contraction de chemical sex, il est implacablement attiré par cette nouveauté : il faut qu’il écrive un article sur le sujet. Comme son nom l’indique, le Chemsex est la pratique du sexe sous drogues, notamment les nouvelles drogues de synthèse. Très en vogue dans les milieux gays et partouzeurs, la prise de ces psychotropes a pour fonction d’améliorer les performances sexuelles et de décupler les orgasmes. Zède étant un reporter consciencieux, il se doit d’essayer avant d’écrire son papier. Au fur et à mesure de ses rencontres, entre dealers et « partenaires de jeux », il se laisse aller et en redemande encore et encore. Il s’abandonne corps et âme dans ces plaisirs éphémères sans se rendre compte de l’isolement qu’ils génèrent. Délaissant sa femme enceinte et son jeune fils, il va plonger progressivement mais inexorablement dans les abîmes de ce monde qui n’épargne personne.

LE FOND ET LA FORME

Zarca cultive, comme à son habitude, l’ambiguïté évidente entre son personnage et lui. Zède est romancier et pigiste, comme lui. Il fréquente assidûment les milieux festifs et cachés de Paris, comme lui. Il a écrit un livre qui s’intitule « Paris Underground » alors que celui de Zarca avait pour titre « Paname Underground ». Bref, ses lecteurs s’interrogent sur la part d’enquête journalistique et celle du roman. Les thèmes fétiches de l’auteur sont bien présents : les addictions, les pulsions, les compulsions ou encore les obsessions. On retrouve aussi sa virtuosité à décrire la descente aux enfers d’un homme, sa dépendance et sa déchéance physique. Si l’on ne doute pas du fait que le narrateur soit un personnage et non l’auteur lui-même, ce dernier est, en tout cas, parfaitement documenté. MDPV, 3-MMC, 4-MEC, GBL… On croirait lire des noms de robots humanoïdes dans un livre SF. Ce sont les drogues de synthèse citées en série dans le livre façon ordonnances médicamenteuses.

LE BILAN

J’aime beaucoup Johann Zarca. Son parcours est incroyable. Partir d’un blog, puis s’auto-éditer, obtenir contre toute attente un prix littéraire majeur, et continuer sa carrière chez Grasset… Beaucoup d’aspirants écrivains, dont je suis peut-être un peu, en rêveraient. Pourtant, et parce qu’il faut bien que je sois honnête, j’ai été assez déçu par « Chems ». La qualité de description de l’avilissement façon Charles Bukowski que j’avais entrevue dans « Paname Underground », je ne l’ai pas retrouvée ici. Le jusqu’au-boutisme à la Virginie Despentes non plus. Les personnages sont moins profonds, moins fouillés, plus superficiels. Pour ceux qui ne connaissent pas l’œuvre de Zarca, je recommande donc chaudement de commencer par « Paname Underground » disponible aux éditions Le Livre de Poche. Je vous invite aussi à regarder ses interviews, pour vous rendre compte à quel point l’homme est attachant. Enfin, je vous rappelle que l’addiction à la littérature n’est absolument pas un fléau.

Cheers Johann Zarca

« Chems » est édité chez Grasset

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