[Interview] Tout nu dans l’escalier ! L’art #NSFW de Karlo Martinez

Instagram l’a banni : rencontre avec Karlo Martinez, un architecte et artiste protéiforme qui a choisi l’autoportrait et le collage pour se mettre à nu.

Ses œuvres ont fait le tour des galeries et ont été exposées en ligne notamment sur TOH! Magazine et l’excellent site Pornceptual. Dans son travail, Karlo explore de manière frontale l’homo-érotisme, le design, le consumérisme, la sexualité. Le tout saupoudré de claquettes-chaussettes (oui, oui).

Tout le monde à poil(s)

Né au Mexique, Karlo a quitté un milieu catholique et conservateur pour se libérer en Australie, où il vit depuis. Car la nudité, quoi qu’on en dise, reste politique et se foutre à poil n’est pas la moindre des revendications quand on n’est pas bodybuildé/épilé/huilé (rayez la mention inutile). Karlo utilise son corps et ses ciseaux pour faire vivre son expérience qui, j’en suis sûr, peut parler à chacun de nous, surtout après un an passé à traîner en slip, confiné⸱e⸱s dans nos maisons.

AOW : Bonjour Karlo, ton travail est à la fois très personnel et libérateur. Merci de répondre à mes questions.

Karlo Martinez : [en français] Bonjour, merci beaucoup. J’espère que tu ne me trouveras pas ennuyeux !

AOW : Ça m’étonnerait. [Le reste de l’entretien continue en anglais : pardonnez ma transcription et les nuances « lost in translation »]. Quand t’es-tu lancé comme modèle photo et quelle en a été l’impulsion ?

KM : Pour moi, ce que je fais n’est pas vraiment du « mannequinat » (« modelling »). Tout a commencé il y a 10 ans : j’avais 21 ans et le gars avec qui je sortais m’a demandé s’il pouvait prendre quelques photos de moi. Il m’a demandé de me déshabiller un peu et, à ma surprise, je me suis senti très à l’aise et c’est comme si quelque chose à l’intérieur de moi s’était réveillé. J’avais rencontré mon côté exhibitionniste et j’ai adoré ça.

« Je considère le X comme une œuvre d’art. »

J’aime beaucoup être nu et m’exhiber devant l’objectif. Après quelques années de séances photo avec les photographes que je rencontrais, j’ai décidé de créer mon profil Instagram et ma page Tumblr. C’est là que les choses se sont vraiment accélérées et que j’ai gagné beaucoup d’exposition en ligne. J’ai aussi essayé brièvement de tourner du porno gay, mais je me suis rendu compte que ce n’était pas vraiment ce que je voulais faire.

[Petite parenthèse : en décembre 2018, Tumblr a exclu tout contenu « adulte » de sa plateforme, en rendant chaque post un peu explicite seulement visible par son auteur. Et au moment où j’écris ces lignes, le compte Instagram de Karlo (11 000 abonnés) vient d’être désactivé. Ce qui vous dit tout ce que vous devez savoir sur les géants du social media. (EDIT 20/05 : voici le nouveau compte de Karlo).]

AOW : Des sites comme Pornceptual et des cinéastes tels que Noel Alejandro ou Erika Lust aiment repousser les limites en montrant des corps et des personnalités que l’on voit rarement. Avais-tu de tels exemples en tête ?

KM : Oui, complètement. Je me me rendais bien compte en grandissant que j’étais très poilu. Mais désormais je suis à l’aise avec ça et avec mon corps en général. Ce qui m’intéresse aussi, c’est de me montrer tel que je suis. Sans filtres.

« Quarantine Dreams » (2020)

En ce moment, j’ai vraiment envie d’accepter mon penchant pour le sexe dit « passif » (« bottoming »). Et je veux montrer que cela ne devrait pas décider à quel point je suis « masculin » ou « féminin », soumis ou dominant, faible ou fort. C’est pour cela que dans mes derniers collages et autoportraits, je montre des images suggestives, des positions, des situations où mon cul est pleinement visible par tous.

Je suis actuellement fasciné par les « thongs » [ndlr : sortes de strings plus confortables, avec plus de tissu]. Ils sont si délicats et féminins, et j’adore le contraste entre un homme velu au cul poilu, comme moi, qui porte un joli petit « thong » comme sous-vêtement. Vous me verrez en porter beaucoup dans mes prochains travaux !

AOW : Comment ton métier de designer contribue-t-il à ton travail artistique ?

KM : Mes études et ma carrière d’architecte ont une énorme influence sur mes collages. Tout ce que je sais sur la couleur, la composition et le design graphique, je le dois à mes études d’architecture. Je prends un grand soin à planifier un collage, à prendre en compte quels éléments se combinent bien entre eux, et comment ils vont s’assembler.

J’aime aussi introduire de l’imagerie architecturale dans mes travaux de collage. Sélectionner des découpages d’intérieur provenant de magazines de design, et qui serviront de décor à mes personnages. J’adore le contraste entre un bel espace minimal aux lignes épurées, et une activité sexuelle explicite ou une image suggestive. Vous pourrez ainsi me voir dans une orgie en plein air parmi l’un des chefs-d’œuvre de Richard Maier, ou en train de me faire manger le cul dans le salon d’une des maisons de Sean Godsell. Tout est possible dans le monde de mes collages et de mon imagination excitée.

« An Afternoon With James And Karlo » (2021)

AOW : Ta dernière séance avec un photographe était particulièrement intense et semble annoncer de nouveaux travaux vidéo. Ce média t’intéresse-t-il toujours ?

KM : Oui, j’aimerais beaucoup tenter de nouveaux travaux vidéo et travailler avec d’autres personnes. Je pense que c’est la meilleure chose que je pourrais explorer et je veux vraiment l’essayer. J’ai juste besoin de trouver les bons créateurs et collaborateurs avec qui travailler. Par exemple, j’adore le film « For Your Gods » de l’artiste Venfield 8. Je suis obsédé par cette vidéo ! Elle est hyper sexy et bien réalisée. L’acteur Brian Maier est canon ! J’adorerais faire partie d’un projet comme ça !

« Nous vivons dans une société où le sexe (hétérosexuel pour la plupart) est partout dans les média, et la majorité d’entre nous consomme du porno. Pourquoi devrions-nous avoir une attitude de honte ou de culpabilité par rapport à ça ? »

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