Métaphysique du Rock #16 Nick Cave, live

En cette fin de mois d’août, Nick Cave était de passage à Rock en Seine. Accompagné de ses Bad Seeds, il a livré une performance on ne peut plus incroyable.

Alors oui, le très cher RINO vous a déjà évoqué un concert de notre australien préféré il y a peu et loin de moi l’idée de tomber dans la redite. Je vais donc tâcher de traiter le sujet différemment. Commençons dès lors par remettre les choses dans leur contexte : c’était grandiose. Je ne suis pas certain de trouver les mots justes pour retranscrire l’intensité de l’expérience vécue.

Nick Cave a perdu un deuxième fils cette année, peu avant le départ pour la tournée européenne. Ces concerts sont donc sa façon à lui de vivre son deuil. Un deuil que le public a vécu avec lui. Vous avez déjà assisté à un concert, vous, où des inconnus se prennent dans les bras portés par l’émotion à l’issue des morceaux ? Être sur scène, c’est sa catharsis. D’ailleurs, cette notion de catharsis était l’un des fondements de la grande Tragédie, d’Aristote à Racine en passant par Shakespeare. Cave est dans la lignée de ces noms séculaires.

« We make a little history, baby / Every time you come around »

Si hiérarchiser l’art a quelque chose d’un peu con, il n’en demeure pas moins qu’un certain consensus se crée pour considérer des chefs-d’œuvre : Hamlet, Citizen Kane, la neuvième de Beethoven, le plafond de la chapelle Sixtine, etc. En somme, ce sont des œuvres qui repoussent les limites de l’art et des émotions qu’il peut procurer. Mes bons amis, un concert de Nick Cave c’est la même chose. Pour ma part, j’échange « La Joconde » tous les jours contre un tel show.

Nick Cave est un interprète prodigieux. Dans sa bouche, les mots prennent une ampleur nouvelle, déchirante aussi. La chanson « I need you » avait été écrite sur Skeleton Tree, suite à la mort de l’un de ses fils en 2016. Tragiquement, l’histoire s’est répétée. Quand Cave a le courage de chanter cette chanson, psalmodiant longuement ces trois mots, on prend conscience de l’intensité du deuil, de la détresse et de toutes ces situations auxquelles la vie nous confronte injustement. On comprend également toute la puissance que l’amour procure, celui d’un père pour son fils, ces sentiments qui nous font nous sentir terriblement vivant. Embarquer sur le navire Cave, c’est arpenter l’océan des émotions dans toute son immensité, des baies paradisiaques aux eaux sombres et glacées.

Pour parler franchement, après ce concert, je me suis dit que jusqu’à présent j’avais commis l’erreur de sous-estimer la musique, de sous-estimer l’art finalement. Il ne s’agit pas seulement d’écouter des albums, de lancer ses playlists et de gratter trois accords pour se convaincre d’aimer la musique. Non, il faut la transpirer. Croyez bien que devant Nick Cave on transpire tous. Et qu’on en redemande.

1 Comment

  • Christine Piochelle
    Christine Piochelle

    Magnifiquement écrit. Très émouvant.

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