Métaphysique du rock #2 Le cas Joy Division

« Tirer l’éternel du transitoire » C. B.

Il s’avère que Ian Curtis était lecteur de Baudelaire, que Joy Division avait pour chanteur Ian Curtis et, qu’avec le diptyque Unknown pleasuresCloser, Joy Division a immortalisé la morosité mancunienne de la fin des années 70. Finalement, la discographie de Joy Division c’est peut-être bien le spleen de Manchester. Qui plus est, l’auteur des « fleurs maladives » et les acolytes anglais partagent ce côté transgressif. Baudelaire a été condamné pour « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs », vous conviendrez que l’outrage n’est pas loin lorsque l’on choisit un nom de groupe évoquant le régime nazi.

« Live fast, die young » J. D.

La trajectoire du quatuor est foudroyante. D’abord Warsaw (passion pour Bowie oblige), la bande se renomme Joy Division. La formation définitive se compose de Peter Hook à la basse, Bernard Sumner à la guitare, Stephen Morris à la batterie et Ian Curtis au chant donc. Le premier concert de Joy Division a lieu fin janvier 1978 et Ian Curtis se suicide en mai 1980. Autrement dit, c’en est fini du groupe avant même que le deuxième album soit disponible à la vente. Triste prophétie ou pas, la couverture de Closer est un tombeau. Ian Curtis est mort à 23 ans, comme James Dean.

joy divisio,

Il est aisé de se perdre en conjectures. Que serait-il advenu de ce groupe sans la mort prématurée de Ian Curtis ? Aurait-on eu des albums aussi grandioses que les 2 premiers ? La tournée américaine avortée aurait-elle permis à des artistes de se rencontrer à un concert et de fonder un groupe incroyable ? Évidemment, on n’en saura jamais rien et on ne va pas commencer à avoir de regrets quant aux événements non advenus. En revanche, on peut se poser une autre question : quel est l’impact du suicide de son auteur-chanteur sur la réception des albums ? La musique de Joy Division est sombre, indéniablement. Seulement, ce n’était pas du paraître. Barbara Curtis, veuve de Ian, et les autres membres du groupe ont compris a posteriori que les maux de Ian étaient dans ses textes. Pas forcément un appel à l’aide, il s’agit davantage de l’expression d’un ressenti plein d’acuité. Avec un brin de cynisme on pourrait dire que sa lucidité était la cause de ses tourments. Et donc l’impact ? Le suicide de Ian Curtis est indissociable de la mythologie Joy Division. L’effet cathartique des morceaux du groupe en est décuplé. L’auteur de ces textes était bien plus torturé que la population de Manchester fin 70’s n’était désabusée. Ce qui n’est pas peu dire.

Quiconque a découvert Joy Division avec Unknown pleasures a entendu ce morceau en premier. Il n’y a pas de meilleure entrée en matière possible. « Disorder » est la porte d’entrée vers de nouveaux horizons. Il y a un avant et un après, comme si le champ des possibles s’était élargi. Pour preuve, quantité d’artistes se diront influencés par Joy Division.

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