Bonne nouvelle ! Rone est de retour avec un vrai album !

Rone, Rone, Rone. Cela fait bien longtemps que je n’avais pas croisé la route de cette musique aux allures de carte postale.

Auteur de multiples rêves sonores, le français Erwan Castex a su séduire le monde au fil de ses albums. De Spanish Breakfast à Mirapolis en passant par le magique Tohu Bohu, il a dessiné les paysages de son univers musical jusqu’à en devenir le véritable guide à la façon d’un Jean Michel Jarre.

Rone, le Jean Michel Jarre des années 2010.

Nous sommes nombreux à avoir pris la route de ses espaces oniriques qui ont vu le jour alors que Rone n’était encore qu’un étudiant. Plus qu’un simple passe-temps, sa musique lui permettait d’ouvrir la fenêtre vers un ailleurs presque palpable. Une véritable bouffée d’oxygène qui permettait de sortir du cadre conventionnel des sorties musicales de l’époque. C’est cette vision de la musique qui lui a valu de se faire remarquer par les équipes du label InFiné. Un label indépendant massivement tourné vers le futur et les nouvelles possibilités de la musique.

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Un sceau de qualité qui correspond parfaitement à Rone qui cherche toujours à expérimenter et proposer de nouvelles choses. S’il fallait présenter Rone et sa musique, son album Tohu Bohu (sorti en 2012) serait le plus à même d’en dire le plus. Pour la production de cet opus, Erwan a quitté ses terres natales pour se rendre à Berlin. À l’époque de la sortie de cet album, nombre de personnes se sont interrogées sur la capacité de la ville à pousser les artistes dans leurs derniers retranchements. Cette ode musicale était, en effet, les prémisses d’un nouveau Rone. Chaque morceau était rempli de nombreux détails et idées largement distillés pour proposer quelque chose de nouveau. Si, au global, on reconnaissait la touche de l’artiste, de nouveaux éléments venaient nous surprendre à l’écoute. Je pense ainsi à sa collaboration avec High Priest de Antipop Consortium.

Autant être clair, Tohu Bohu trône encore aujourd’hui dans mes albums préférés. Tout du long de l’album, on distingue la puissance maîtrisée de bout en bout par Rone pour faire de sa musique un véritable voyage immobile. S’il ne fallait retenir qu’un seul morceau, je choisirai sans hésiter Parade. La version repensée de ce titre par Dominik Eulberg avait d’ailleurs une place toute particulière à l’époque où je passais derrière les platines. Une signature commune à Rone pour terminer des sets endiablés avec une invitation au calme.

2020 – Rone with a view

Je ne pouvais pas parler de ce nouvel album : Room with a View, sans repasser par Tohu Bohu tant les deux albums semblent se répondre l’un à l’autre. Un trajet musical en aller/retour avec deux albums en guise de billets à présenter au contrôleur.

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Depuis 2012, Rone ne s’est pas arrêté. Autant être honnête, je l’ai suivi sur ses releases suivantes, mais sans jamais retrouver cette même magie qui entourait Tohu Bohu. Créatures (sorti en 2015) avait été même le début de ma rupture avec Rone. Je lui avais d’ailleurs écrit une lettre publiée chez Open Minded. Puis, en 2017, Mirapolis sonnait comme une entente cordiale. Qui de nous deux jouait le rôle de l’URSS… Je n’ai jamais su.

Tel la paix de Gorbatchev, Room with a View est apparu dans les sorties que j’attendais. D’abord imaginé comme la bande originale d’un spectacle avec la compagnie La Horde, cet album sonne comme la fin d’une époque. Il est loin le temps de la trahison et de la déception. Rone semble être revenu en arrière avec un nouvel album qui revient aux sources.

Tout ce qui a pu faire mon amour pour Tohu Bohu est revenu à sa place. Rone reprend son rôle guide pour nous accompagner dans un voyage musical à l’ambiance nocturne. C’est tout à fait le genre d’album à écouter pleine balle en fin de journée. La puissance maîtrisée que le producteur semblait avoir refoulée pour ces deux derniers albums est enfin revenue et on reprend plaisir à voir le plafond et le toit voler en éclat pour s’envoler.

Le premier morceau de l’album incarne parfaitement cette vision. Lucid Dream. Au-delà du nom du morceau, son atmosphère résonne dans nos oreilles comme une drogue binaurale pourrait le faire. On est directement envoûté par l’ambiance. Plus qu’un simple premier morceau, c’est une couverture que Rone vient nous donner. Il nous borde et nous fait un petit bisou avant de nous laisser partir dans son monde.

Accrochez-vous. Rone Airlines nous embarque.

Une fois le décollage achevé, on est lancé. Room with a View est l’expression musicale de « le voyage était la meilleure partie de vos vacances » que certains pros du marketing aiment à utiliser pour vanter les mérites de leurs moyens de locomotion. Rone a su capter l’essence de cette idée pour en faire sa musique. Oui, le voyage est génial, mais avec lui il n’y a pas de destination. On est calé dans notre fauteuil pour un trajet sans autre but que lui même. Certains pourront y trouver une direction, mais je me contenterai de rester avec l’équipage pendant encore un bon moment.

Vient alors Nouveau Monde. Un nom qui, encore une fois, montre toute l’idée qui se cache derrière les albums de Rone. Il est parti ailleurs, il a parcouru le chemin, mais il n’a pas oublié d’où il vient. Ce morceau sonne nouveau, mais garde une trace de l’héritage de l’artiste. Un petit retour en arrière avec un dialogue cité qui n’est pas sans rappeler le Bora avec vocal. En 2012, Rone reprenait les mots de Alain Demasio qui se parlait à lui-même à l’époque alors qu’il était confiné en Corse pour écrire un roman. En 2020, il redonne la parole à Alain qui échange désormais avec l’astrophysicien Aurélien Barrau. Le dialogue se fait un peu plus marqué et engagé. Rone a su redéfinir son imaginaire, mais aussi sa musique. Le discours est plus engagé et la musique plus onirique.

Peut-être que sa perception a tourné ou que sa carrière lui permet d’essayer de nouvelles choses. Une chose est sûr, il est bel et bien de retour pour notre plus grand plaisir.

Je ne pouvais pas passer à côté de Human. Cette version ronisée d’un lointain Human After All connu de tous. Après tout, nous sommes Humains. Ce titre a eu le droit à un magnifique portage en clip dans les salles du Château de Châteaudun. Entre ombres et lumières, on peut enfin mettre une image sur les pérégrinations musicale d’Erwan et le « contrôle » qu’il donne aux rêves.

Au final, tout l’album reste empreint de cette notion de rêve ou de déplacement. Si le Club Med était un label, il ne fait nul doute que Rone serait le meilleur G.O. et représentant de la bonne ambiance dans les échappatoires à la routine. Si la musique est un témoignage des sentiments de ce qui la font, il est clair que Rone a le rôle du mec toujours heureux. Celui qui te surnomme « Ma caille » et qui est toujours là quand ça ne va pas.

A friend in need, is a friend indeed.

À la manière d’une dissertation, j’avais envie de terminer mon article par une ouverture. Imaginer ce qu’il aurait pu faire s’il n’avait pas pris ce rôle. Et si Rone avait eu sa part d’ombre. Une envie d’exprimer un truc un peu plus obscur… Qu’est-ce que ça aurait donné ? Origin est peut être son titre le plus méchant, mais j’attends encore de voir Dark Rone à l’oeuvre.

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