Tim Burton ce nom fut un temps lointain résonnait dans l’esprit des cinéphiles du monde entier comme une douce et poétique mélodie teintée de noir qui nous emportait dans des univers oniriques uniques en leur genre portant tous la trace bien définie de leur auteur. Malheureusement il y a prés d’une vingtaine d’année ce prodige venu de la banlieue de Burbank à Los Angeles fut atteint d’une terrible affliction, celle de l’âge qui passe et de l’argentfacilitite aiguë qui a rapidement sclérosé à la foi son être et son cerveau génial et si particulier. L’homme en noir aux cheveux hirsutes (qui ressemblaient plus à un potentiel 5 ème membre des Cures, qu’au stéréotype barbu, chauve et casquetté des rréalisateurs hollywoodiens alors en masse sur le marché de l’époque) sortait alors auréolé du succès incommensurable et au combien mérité de son magnifique court métrage Vincent. Film quasiment autobiographique rendant hommage a son idole Vincent Price.
Ses adaptations du show TV PeeWee, de Beetlejuice (car au début ce film devait être un film d’horreur pur destiné à être un nouveau film façon l’Exorciste, mais il y a ajouté sa griffe perso pour le meilleur), des de ses deux Batman, et d’Edward aux mains d’argent ou encore son grand chef d’œuvre ED Wood.
Car le talent inné de Burton à la différence d’un grand nombre de ses collaborateurs est de complètement s’approprier le sujet qu’on lui confie et de faire en sorte de tellement y mettre de lui, de sa créativité et de sa griffe artistique, qu’on en oublie parfois qu’il n’est pas le créateur d’origine de l’histoire.
Difficile alors de croire à cette époque que la simple annonce d’un futur film du Sieur Burton dans l’avenir ferait frémir ses fans hardcore de la première heure, peu impatients de voir leur ancienne idole s’enliser à chaque fois dans un marasme avéré et dans une incapacité flagrante à se renouveler. Accumulant à partir du milieu des années 90 les bévues filmiques (ce que j’entend par bévues est dans le fait qu’aucuns de ses films ne possédaient la force et l’originalité dont il fit preuve auparavant) avec un certes sympathique Mars Attack, un catastrophique et honteux REMAKE grrrr de la Planète des singes (qui bénéficie cependant de maquillages et d’une direction artistique au niveau de l’univers simien qui est exceptionnelle), le foirage ennuyeux à l’esthétisme pourtant indéniable (visuellement inspiré de l’univers gothique du transalpin Mario Bava) fut son adaptation du roman classique de Washington Irving Sleepy Hollow, ou encore un Big Fish que personnellement j’aime bien, mais qui malgré tout, ne marque pas du tout la filmo de son auteur.
Que s’est il passé ? Burton a perdu son mojo ? N’y croit plus ? Ou a t’il simplement vieilli et a décidé de ne plus lutter contre les moguls intransigeants qui dirigent de main de fer un Hollywood anémié de toute forme d’imagination et de créativité dont il fut un temps le chantre ? Où est passé cet enfant, cet ado, ce jeune homme Peter Panesque qui avait teinté de son talent, de couleur sombre et de rayures noir et blanc tout une époque cinématographique ?
Et bien c’est très simple le jeune Tim Burton était ce que l’on appelle un génie torturé, un être à part dans un Hollywood formaté qui parvenait a nous plonger dans les méandres de son imaginaire sombre, poétique et débridé. Mais surtout c’était à l’image de son univers filmique et artistique un être dépressif, parvenant à transformer sa tristesse intérieur en univers singuliers emprunt d’une étrangeté, mêlé de féerie et d’un humour flirtant avec une certaine forme d’esthétisme horrifique. Puis le jeune homme a pris de l’âge, une certaine maturité et progressivement le Peter Pan qui était en lui a commencé à avoir du poil au couilles, à regarder Wendy différemment et il est devenu un adulte (Il est arrivé la même chose à Tonton Spielberg qui à contrario de Burton est lui resté un grand réal, mais dans un style ultra différent et ce après avoir tourné sa liste de Schindler). Burton a vécu en couple, a eu des enfants, s’est empâté et a commencé à voir la vie du bon côté. Humainement ce n’est jamais mauvais, mais artistiquement c’est souvent catastrophique. Imaginez un peu la merde que feraient certains musiciens comme Kurt Cobain s’il n’avait pas eu la bonne idée de se tromper entre un sucre d’orge et un canon de fusil de chasse (humour noir pas drôle, mais réaliste constat) et bien ça serait devenu les Foo Fighters (humour encore). Mais Burton étant aussi estampillé Burton en tant que réal devait continuer dans un certain registre, celui dans lequel il excellait plus jeune ne semblant plus autant le faire vibrer. Je pense certes en caricaturant a fond ce qui lui est peu être arrivé, que je ne suis pas loin de la vérité. Le pépère Burton se serait forcé à retrouver la plume magique qui le fit voler aussi haut qu’un certain éléphant volant et n’est jamais parvenu a re décoller à cause du poids de la quiétude familiale, de l’American way of life et des majors hollywoodiennes toujours plus étouffant. Ok il a carte blanche sur une grande partie des projets sur lesquels il travaille, mais peut être n’a t’il plus le même truc si particulier qui faisait de lui Tim Burton.
Mais depuis quelques années malgré certains films ratés qui seront cités plus bas, Burton semble effectuer un retour aux sources en demi teinte. En adaptant avec plus ou moins de brio la série télé culte outre atlantique Dark Shadows, en tentant de reproduire le succès du merveilleux L’Etrange noël de Monsieur Jack (qui au passage n’est pas réalisé par lui, mais par l’animateur Henry Sellick) avec un joli mais creux et sans âme Les Noces Funèbres. N’arrivant pas a se détacher de celui qu’il considère comme un alter égo Johnny Depp, il va progressivement s’enfoncer dans un marasme et devenir la risée de ses fans de la première heure. Enchainant l’adaptation du classique de Roald Dahl Charly et la Chocolaterie film sympathique, mais jamais magique avec une fois de plus un Johnny Depp en manque de sobriété. Puis avec la comédie musicale de Broadway avec le vomitif Sweeney Todd (de loin son plus mauvais film). Il décide ensuite d’adapter l’une de ses rare créations à 100% personnelle avec le film d’animation Frankenweeny.
Mais malheureusement si le métrage est sympathique, Burton ne parvient pas a un résultat réellement satisfaisant et malgré certains passages réussis le film peine a retrouver la magie absolue de son court métrage d’origine.
En adaptant le chef d’œuvre de Lewis Caroll Alice au pays des merveilles il se tire une grenade dans la jambe, alors que pourtant il réalisait un rêve de môme en le réalisant. Malgré le fait que ce film soit pourvu d’un mauvais gout évident et soit plus proche du nanard de luxe que d’une vrai belle adaptation des aventures d’Alice, il n’est pas dénué d’intérêt et d’une certaine façon amorce un retour de Burton au merveilleux mêlé, l’étrange et à la folie.
Retour à ses sources et a son identité d’origine avec Here with me un clip pour le compte du groupe The Killers qu’il tournera à Blackpool dans le nord de l’Angleterre et où il retrouve pour l’occasion sa muse de ses débuts la talentueuse et superbe Winona Ryder. Un clip où plane les tocs Burtoniens, la mort (ici symbolisé par l’inanimé), la poésie de l’étrange, la solitude (dont Burton enfant et ado fut la proie quasi volontaire) et les rayures noir et blanche.
Par la suite il fait un écart vers le biopic en adaptant la vie des époux et peintres Margaret et Walter Kean avec ce que je considère comme un téléfilm de luxe Big Eyes. Certes le père Burton à presque 60 ans tente désespérément un retour en grâce (ou pas) auprès de ses fans. Je ne parle pas des fans qui ne l’ont connu qu’au travers de l’Etrange Noel de Mr Jack lorsque Disney a fait une gigantesque OPA sur le merchandising autour de Jack Skellington, mais des vrais ceux des débuts, ceux de Pee Wee, Beetlejuice ou Edward, pas ceux qui au finish n’ont découvert Burton via les sous produits qui ont suivi cette première periode. Car au bout du compte il doit bien y avoir un moment où seul dans son grand lit le soir le vieux Tim doit faire le bilan et ça ne doit pas être joyeux. Car on ne parle pas ici de réussite financière, mais artistique et personnellement je le considérait comme l’un des plus grands artistes de sa génération. Un homme capable d’ajouter sa patte a tout ce qu’on lui confiait en terme d’adaptation. Car si Burton est en grande partie un adaptateur plus qu’un auteur en matière de cinéma, auteur il l’est du côté de la littérature, du dessin, de la peinture et au travers de ses premières œuvres en cinéma d’animation et c’est pour cela que Burton est un grand artiste malgré ses choix cinématographique malencontreux des 20 dernières années. Après ce rapide tour d’horizon de ce génie quelque peu déchu, mais qui effectue lentement mais surement un comeback.
Et c’est pour finalement en arriver à son dernier né cinématographique Miss Peregrine et les enfants particuliers. Alors qu’en est il de cette nouvelle livraison Burtonnesque et justement qu’en est il du Burtonnesque dans ce film de commande (encore) adaptation du best seller pour enfant de Ransom Riggs. Vous vous en douterez une fois de plus on est bien loin des glorieux chefs d’œuvres filmiques du jeune homme aux cheveux noirs pétaradants, mais le métrage n’est pas désagréable au final.
L’histoire est celle de Jake un adolescent vivant en Floride de nos jours. Lorsque son grand-père Abe décède dans des circonstances à la fois étranges et terrifiantes, il découvre que toutes les histoires qu’il lui racontait enfant étaient vraies. Jake et son père se rendent alors sur la mystérieuse île de Cairnholm, en Angleterre. Jake y découvre les ruines d’un orphelinat ayant appartenu à une certaine Miss Peregrine et qui abritait durant la seconde guerre des enfants aux dons particuliers et va devoir s’allier avec eux afin de contrer les plans machiavéliques de l’abominable Mr Barron.
Alors qu’en est il au final ? Et bien l’on peut aisément comprendre pourquoi Tim Burton a accepté d’adapter ce bouquin, car on y retrouve un grand nombre d’éléments qui ont littéralement constitué son univers d’enfant et celui d’adulte. On y retrouve, un adolescent rêveur et solitaire, des parents absents, des freaks qui se cachent dans cet étrange orphelinat, une femme à la fois forte, fragile et sombre comme il les affectionne en la personne de la toujours formidable Eva Green (étonnant qu’il ne l’ai toujours pas demandé en mariage tiens), une poésie macabre et merveilleuse qui plane un peu partout et des créatures pouvant se révéler flippante pour les plus jeunes.
Alors c’est parfait me direz vous. Papy Burton a retrouvé ses jouets d’enfants. Et bien je dirais Oui et Non. Car si le film regorge des éléments magiques et des tocs artistiques de son réalisateur, il ne contient pas vraiment la magie des œuvres phares du génie hirsute. Le casting est sympa, Eva Green cabotine toujours autant et pour mon plus grand plaisir et porte le film sur ses épaules, les jeunes acteurs sont tous bons, on y retrouve même une sosie juvénile de Helena Bonham Carter l’ex femme de Burton en la personne de la jeune actrice Ella Purnell. Seul gros bémol en la personne du pourtant toujours excellent Samuel L Jackson est au minimum syndical et joue les méchants de service avec la conviction d’un éboueur a qui on vient d’ordonner d’aller balayer les champs Élysées sous la pluie un soir de Février (oui c’est du vécu du temps où j’en étais un), c’est dire si il n’est pas au top.
Les personnages des enfants particuliers sont cependant tous très attachants, et le visuel parfois assez steampunk est vraiment intéressant. Le design des créatures est parfaitement dans l’esprit Burton à la fois onirique, effrayant et cartoonesque.
Si Burton ne parvient pas a retrouver la magie d’antan, il parvient a insuffler de vrais clins d’œil et références a son propre univers intérieur, les freaks, les foires, les squelettes, les monstres etc… Il parvient d’ailleurs a caser un joli hommage au légendaire combat de Jason contre les squelettes de Jason et les Argonautes de Ray Harryhausen ainsi qu’un hommage a lui même lors d’un passage où des poupées désarticulées et réanimées en stop motion qui ressemblent furieusement a ses propres illustrations de son recueil de poésie La triste fin du petit enfant huitre et autres histoires.
Au final Miss Peregrine et les enfants particuliers n’est ni une réussite ni un échec, c’est un joli produit pour enfant, bénéficiant de juste assez d’âme pour sortir du carcan des films pour enfants et ados dont on est abreuvé plusieurs fois par an. Il bénéficie de fort beaux aspects techniques, d’une bonne interprétation, mais manque un peu de profondeur ou plutôt de la magie des œuvres passés de Tim Burton. Ce dernier se permet même un petit retour dans la ville de Blackpool où il tourna il y a quelques années son clip pour the killers. En parlant de musique cette dernière est aussi grandement heurté par l’absence du compositeur quasi attitré de Burton depuis ses débuts j’ai nommé le grand Danny Elfman. Ici la Bo est composé par le duo Michael Higham et Matthew Margeson et si c’est de bonne facture, ça ne possède absolument aucune magie.
Si bien entendu ce film annonce un net retour à la qualité de la part du réalisateur qui a passé ses 20 dernières années a s’autodétruire. Et on est endroit de penser que d’ici peu de temps le grand Burton de jadis fera son grand retour. Et un projet en particulier pourrait être l’élément thérapeutique favorable a ce retour en grâce, Beetlejuice 2 ont il ne cesse d’avancer la prochaine mise en chantier, malheureusement il passe aussi son temps a repousser, le projet, à l’annuler et à le remettre sur le tapis.
Reculer pour mieux sauter ? Pourquoi pas ! Ce serait formidable que Burton retrouve l’équipe qui l’a littéralement mis sur les sentiers de la gloire. Michael Keaton serait encore parfait sous le blafard et vérolé maquillage du célèbre bio exorciste, et Winona Ryder sous les traits d’une Lydia Deetz quadragénaire serait merveilleuse. Et en plus Burton pourrait se faire plaisir en ajoutant son chouchou Johnny Depp en méchant frère de Beetlejuice par exemple. En tout cas moi je serai fou de voir ce retour aux sources. Cependant si Miss Peregrine et les enfants particuliers n’est pas un grand film, il mérite le déplacement car il est honnête, sympathique et joli, ce qui n’est pas donné à tout les gros films de majors ces derniers temps.