« We are the reckless, we are the wild youth ». Sorti en 2011, ‘Youth’ est le titre qui a permis à Daughter de sortir de l’ombre. Depuis, la ligne de conduite est parfaite : deux EP ‘His Young Heart’ et ‘The Wild Youth’, puis un album ‘If You Leave’, le tout applaudi par la critique et le monde indie.
Daughter c’est d’abord une voix, celle d’Elena Tonra, fragile et puissante en même temps. Point d’assurance ici : nous sommes souvent à la limite de la cassure, l’émotion semble pouvoir prendre le dessus d’un moment à l’autre. Longtemps seule, c’est au lycée qu’Elena rencontre Igor Haefeli et commence ainsi un projet de groupe. L’expérience fonctionne, l’envie de partager et de créer à plusieurs se fait encore sentir, c’est tout logiquement que Remi Aguilella rejoint les deux lycéens londoniens, pour notre plus grand bonheur.
L’écoute (attentive) de l’album ‘If You Leave’ ne laisse pas intacte, on voyage avec les musiciens. Néanmoins la ballade ne s’annonce pas être de tout repos. Dès le premier titre ‘Winter’, la musique nous trompe : apaisantes, voir monotones, les deux premières minutes se laissent porter sur une mer plate, sans danger. Vient le bridge, percussions, montée en puissance puis le déluge. Et c’est un ascenseur émotionnel qui est présent tout le long de l’album. On se sent fort puis fragile, seul puis heureux. Mais ce qui frappe c’est l’espoir dégagé par tous les titres. On n’est jamais perdu, on sait que l’on va s’en sortir d’une façon ou d’une autre. Daughter semble avoir créé la bande originale d’une génération : incomprise comme toutes, perdue parfois, mais jamais fataliste. Grâce à internet, nous avons la possibilité de connaître le monde, au moins virtuellement. Nous savons ce qui fonctionne, ce qu’il faudrait changer. Nous rêvons, nous remettons tout en cause, et cela transpire de ce magnifique disque.
La joie de ‘Human’, la mélancolie de ‘Shallows’, l’assurance de ‘Tomorrow’… Les exemples n’en finissent plus pour expliquer la complexité de cet album. Techniquement parlant, le jeune groupe est déjà très au point. Finesse et précision sont au rendez-vous. Guitares acoustiques ou électriques, percussions et arrangements électroniques, parfois, sont les clés de ce folk anglais nouvelle génération. A la manière d’un Ben Howard ou d’un John Martyn (pour les plus vieux), les mélodies sont en majorité sombres, la musique de Daughter est toujours à la lisière entre la lumière et les ténèbres.
Un bel album entre hiver et printemps, il a beau faire encore froid les premiers bourgeons apparaissent, et annoncent une heureuse continuation pour Daughter, et pour nous.