La douzième et ultime saison de Curb your enthusiasm (Larry et son nombril en Français) que l’on pourrait traduire par « calme ta joie » vient de s’achever. Douze saisons sur vingt-quatre ans, une foultitude de récompenses, et pour ceux qui ont suivi les « aventures » de Larry David, auteur et personnage principal de la série, c’est un véritable crève-coeur. Car malgré l’ approche des 80 piges, il est toujours aussi fringant et plein de verve notre Larry, il nous semblait éternel.
Mais qui est donc ce Larry David ? Il fait ses armes à la fin des 80 s comme tant de comiques américains qui comptent, dans le fameux Saturday Night Live. Il n’y restera pas très longtemps car ses sketches sont retoqués, jugés trop décalés, trop iconoclastes. Lui qui va marquer durablement les trois décennies suivantes n’était pas encore en phase avec son temps. Qu’ à cela ne tienne, c’est donc lui qui va définir les nouveaux canons de la comédie, en la déniaisant et en lui mettant le nez dans la merde de la réalité. Cela ne va pas tarder avec l’écriture de la série Seinfeld, le cultissime show des 90’s. Sa patte est tout de suite reconnaissable, la construction d’épisodes entiers à partir de petits riens, comme un objet qui n’est pas à sa place, une porte qui ne s’ouvre plus correctement et de broder autour pour mieux ausculter les travers de l’époque et les petites mesquineries de l’esprit humain.
Dans le final de Seinfeld on laissait les personnages principaux en prison. C’est donc Larry qui a enfermé Seinfeld, symboliquement du moins puisqu’il en était le showrunner. Et dans le final de Curb your enthusiasm, plus de vingt-cinq ans plus tard, c’est Jerry Seinfeld lui-même qui vient sortir Larry de prison. Il y aurait déjà beaucoup à dire sur cela. En effet, on a longtemps cantonné Larry David à Seinfeld. Cependant, il s’en est affranchi en écrivant, interprétant son propre rôle dans une série qui sera encore plus influente.
Vous avez aimé Platane, la série de Blanche Gardin ,celle de son mec Louie, Fleabag, The Office.. ? Je pourrais continuer la liste longtemps, ils se revendiquent tous de Larry David.
Dans Curb your enthusiasm, Larry David poursuit sa démarche entamée dans Seinfeld et va encore plus loin dans sa quête de réalisme. Larry David qui va laisser une grande place à l’improvisation, interprète donc Larry David, personnage richissime après le succès de Seinfeld.
Larry est un peu le jumeau de Woody Allen, dégarni, grisonnant et binoclard, mais en plus grand, plus gaillard, moins intello et ayant préféré la douceur du climat et le confort des quartiers cossus de Los Angeles. Il va sortir le Soap des studios et virer les rires idiots. Une série comique qui semble nous dire « fini de rire », oui le gars est gonflé. C’est même un vrai punk, mais avec le portefeuille d’un milliardaire. Il peut donc tout se permettre, totale liberté. Tout ce qui compte est son propre bonheur et confort, égocentrique, pingre, il met les pieds dans le plat, fait fi des conventions sociales, ne peut s’empêcher de dire tout ce qu’il pense, quitte à blesser ou embarrasser ses proches. Il ne respecte rien ni personne… à part lui-même bien sûr. Et cependant, c’est surtout notre société qu’il égratigne, ses règles de vie, les convenances souvent ridicules. Et rien n’est épargné durant ces douze saisons, tout passe à la moulinette, la religion, la justice, le showbizz, la politique, les handicapés… LD ne s’interdit rien. Et malgré tout ce que je viens de dire, c’est jubilatoire et très drôle. Et surtout, rien n’y fait, plus il se montre odieux, plus on l’aime. On comprend vite que pour se dépeindre comme il le fait, se montrer aussi vil et détestable, le mec ne peut pas être totalement mauvais.
De plus, il nous venge de tellement des petits coups bas de la vie. Genre une vieille bourgeoise qui vous dépasse dans la file d’attente comme si vous n’étiez rien, invisible, indigne d’intérêt. Vous fulminez, mais ne dites rien, pas d’esclandre. Larry n’est pas comme nous, il va te la défoncer la mamie, c’est plus fort que lui, quitte à se retrouver dans des situations délicates comme cela ne manque pas d’arriver à chaque fois. Et plus il va essayer d’arranger les choses, plus, il va s’enfoncer puisqu’il ne revient jamais sur ses positions.
C’est profond quand la série aborde les thèmes universels tels que l’amitié, le couple, le conflit entre le Moi, et le Surmoi. C’est également très touchant de voir Larry et ses amis (qui jouent pour certains également leur propre rôle) vieillir. Un de ceux-là, présent du premier au dernier épisode, Richard Lewis, qu’on voit diminué et mal en point lors de l’ultime saison, nous a quitté il y a quelques semaines en pleine diffusion de cette dernière. Ce qui rend particulièrement poignant le visionnage de cette salve finale.
Tout au long de ces vingt-quatre années les stars se sont bousculées pour faire une apparition dans le show. Je ne pourrais en dresser toute la liste, je vais citer en vrac : Shaquille O’Neal, McEnroe, Ben Stiller, Michael J. Fox, Jonah Hill, Bruce Springsteen, Mel Brooks, Vince Vaughn, David Schwimmer de Friends, Sienna Miller, Ted Danson, Jon Hamm de Mad Men, Martin Scorsese, Brian Cranston de Breaking Bad, Conan O’Brien, les acteurs de Seinfeld bien entendu…. et plein d’autres. Tout ce beau monde a voulu venir se faire maltraiter par Master David le temps d’un ou plusieurs épisodes.
J’envie tous ceux d’entre vous qui n’ont pas encore vu cette série. Cent vingt épisodes soit environ Soixante-dix heures de bonheur. Et comme pour moi, j’en suis sûr Larry David sera votre nouveau (anti-) héros.
Et ça coule de source mais ça va mieux en le disant : la VO est obligatoire !
La série visible sur Amazon Prime.
Une petite vidéo bonus pour ceux qui ont terminé la série, pour finir tout en émotions :