Faites entrer l’accuséLe brillant duo Brad Falchuk Ryan Murphy célèbres créateurs scénaristes de la (géniale mais trop courte) série Scream Queens et de (l’originale mais trop inégale) American Horror Story, s’attèle ici à la production d’une série dérivée. Le concept semble clair : une saison, une affaire judiciaire. Loin de la folie déjantée des bimbos huppées de Scream Queens ou des canons horrifiques révisités, le duo qui n’est cette fois pas crédité au scénario, semble viser un certain réalisme dans l’adaptation de procès ayant divisé l’Amérique. Le premier choisi n’est pas des moindres puisqu’il s’agit de celui d’O.J Simpson, le sportif et acteur américain accusé du meurtre de son ex femme, Nicole.
Devenu un symbole de la ségrégation raciale, partageant les noirs et blancs d’ un pays suintant le racisme, la misogynie et le puritanisme, l’affaire O. J Simpson avait durant les années 90 largement outrepassé le simple fait divers pour devenir une réelle affaire d’état.
Tout d’abord, il va s’en dire que les fanas de l’esthétique horrifique Recherchée de American Horror ou de l’humour absurde de Scream Queens ne trouveront pas leur compte dans cette sage histoire de procès. Mais, si il y’a un point que le duo maîtrise à merveille une fois de plus, c’est un choix sans failles des protagonistes de l’affaire. Sarah Paulson, une de leurs habituées, incarne ainsi Marcia Cross, avocate de la partie civile, qui tente de se battre à armes égales avec ses adversaires masculins. L’actrice y est extraordinaire et impose un jeu d’une efficacité cinématographique dans cette série télévisuelle. Travolta, un des producteurs de la série, offre les traits de son nouveau visage (entre Bogdanov et Mickey Rourke) à Shapiro, l’arrogant et machiavélique avocat de la défense et nous livre une interprétation plutôt intéressante. A ses côtés, David Schwimmer en ami flapi dépassé par les événements (le maintenant moins célèbre que ses filles Robert Kardashian), et Cuba Gooding jr en star condamnée s’en sortent avec un peu plus de mollesse.
Loin des tours de force scénaristiques des sériés précédentes, le fil narratif de cette histoire réelle constitue a lui seul une trame stupéfiante, regorgeant de rebondissements et de hasards abracadabrants. De preuves douteuses en témoignages controversés, des dimensions d’un gant aux propos d’un flic raciste en passant par une couverture médiatique sans scrupules, tout fait de cette simple accusation un imbroglio pour les jurés. En dix épisodes, le procès parvient ainsi à tenir le spectateur en haleine, malgré sa connaissance de l’affaire. Le scénario parvient à imbriquer subtilement la sphère publique et la sphère intime au sein de cette affaire qui ne cesse d’osciller entre le rationnel et le pathos. Le parti pris des créateurs ne semble pas de prime abord de prendre parti, pour l’un ou l’autre camp même si au fur et à mesure des magouilles judiciaires, une vérité semble clairement s’imposer.
Enfin, pas de grandes prouesses au niveau de la mise en scène, qui se veut avant tout fonctionnelle et tolère une certaine forme de terne notamment dans la direction photo. Oubliez donc l’audace et la folie auxquelles nous avaient habitués ses créateurs, pour savourer cette adaptation très efficace d’une des affaires les plus dingues du vingtième siècle. A quand la saison 2 (avec Sarah Paulson)?