Vincent n’a pas d’écailles est le premier long métrage de Thomas Salvador qui brillait jusqu’à présent dans le milieu très confidentiel du court-métrage : une plongée dans l’univers du long tout à fait réussie!
Vincent est un jeune homme d’une trentaine d’années qui, au contact de l’eau, voit ses forces décuplées. Après un déménagement dans le sud de la France et les magnifiques gorges du Verdon, il rencontre au hasard d’une baignade Lucie, de laquelle il tombe immédiatement amoureux.
Souvent vendu comme un film de super-héros à la française, cette dénomination trompe d’avance le spectateur qui se plaît à le juger à la lumière des grosses productions US alors qu’il apparaît très nettement que le sujet est ailleurs. De toute évidence Vincent n’est pas un super-héros, ni même un surhomme. Il est tout juste un mec, un peu paumé, carrément banal, qui tente d’exister normalement sur terre avec ce corps qui ne réclame que de l’eau.
Le corps. Voilà une des premières intentions du réalisateur : filmer un corps humain dans lequel quelque chose d’inhumain se passe pourtant. C’est tout l’enjeu de la scène pendant laquelle Lucie lui verse de l’eau sur la main pour voir s’il y a une réaction physique. Comment filmer un corps surhumain, dans une enveloppe humaine sans jamais le faire passer pour un monstre ? Le réalisateur répond à cette question par une véritable tendresse du regard mais aussi par beaucoup d’humour à l’image de cette séquence de “la plus longue caresse du monde” souvent jugée très naïve et qui pourtant, contient de nombreux enjeux en elle.
Le reproche régulier fait au film est précisément sa longueur, son statut de long-métrage pour un sujet qui aurait pu être traité en 20minutes. Cependant, Vincent n’a pas d’écailles trouve son rythme dans cette lenteur, dans cette langueur et permet de nous faire ressentir parfaitement les changements et les émotions du personnage. On se prend finalement à vivre avec lui, à retenir son souffle lors des dernières scènes et à respirer seulement lorsqu’un point d’eau apparaît dans le champ. Le film réussit parfaitement à embarquer le spectateur dans cette histoire farfelue et fantastique.
C’est également dans la durée que peut naître un autre discours sur le film. Comment ne pas y voir une allégorie et un éloge de la différence ? Finalement les pouvoirs de Vincent ne font qu’affirmer qu’il est différent des autres et lui font se sentir à part. A l’aise seulement dans son milieu aquatique, apeuré par l’autre, courageux lorsqu’il se dévoile à Lucie, les pouvoirs de Vincent ne sont pas tant un cadeau que la cause d’une exclusion. Pourtant, ce sont ces pouvoirs apprivoisés et acceptés qui le sauvent. Voici l’histoire de Vincent n’a pas d’écailles. C’est sacrément beau.