EVIL / La série démoniaque

 

Evil, dont la troisième saison s’est achevée il y a quelques semaines, est une série de Robert et Michelle King créateurs de The Good Wife et The Good Fight. Autant dire que cela n’est pas flagrant tant ces dernières faisaient plutôt dans la sobriété alors qu’ Evil flirte avec le macabre et le Grand-Guignol, toujours sur un fil.

On peut situer EVIL dans la lignée de X-Files, remplacez les monstres et aliens par des démons.

David Acosta est en formation pour devenir prêtre, un prêtre (sexy) black (cela aura son importance). Son diocèse lui demande d’enquêter lorsque des personnes désemparées font mention de phénomènes et possessions diaboliques. Alors son rôle est de définir si ces manifestions sont réellement d’ordre démoniaque. Pour ce faire, David s’adjoint les services de Ben qui est la caution scientifique. Puis Kristen Bouchard vient compléter le trio, en tant que psychologue. Sa tâche est de déceler si les troubles apparus sont davantage d’ordre traumatique et psychosomatique.

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Ainsi nos trois mousquetaires vont d’affaires en affaires, ils s’entendent parfaitement, mais abordent les faits avec chacun leur croyance fortement ancrée dans leur domaine. Ils sont donc incapables de voir ou encore plus d’accepter ce qui pourrait faire vaciller leurs certitudes. Néanmoins, le Mal n’aura de cesse de s’immiscer dans leur vie respective sous forme d’hallucinations, de cauchemars semi-conscients ou autres situations de plus en plus étranges. Toutefois, doucement mais sûrement, les repères vont s’effriter, leurs vies vont s’assombrir, surtout pour Kristen dont ses quatre jeunes filles (et sa mère) vont être convoitées par les entreprises du Mal.

David, lui homme de foi, veut « voir » car il a eu par le passé une vision (divine) mais il n’en a plus malgré le recours aux opiacés. Kristen et Ben, eux, veulent à tout prix échapper à leurs visions, ou tout du moins être en capacité de les expliquer rationnellement.

Une des forces de la série est de ne jamais trancher vraiment à la fin des enquêtes, et chacun des trois protagonistes principaux repart convaincu par son propre diagnostique, même si les couloirs dans lequel chacun court vont devenir de plus en plus poreux au fil des saisons.

Comme chez X-Files, on peut reprocher, dans la forme, l’aspect expéditif quant à la résolution des cas. Cependant, l’intrigue de fond est davantage prégnante et ne se manifeste pas uniquement lors du dernier épisode de la saison pour nous tenir en haleine jusqu’à la suivante.

Il y a notamment la relation entre David et Kristen dont l’attirance l’un pour l’autre est de plus en plus irrépressible, mais voilà, David se destine à la prêtrise et Kristen est mariée.

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Et il fallait un grand méchant. Il est parfait sous les traits de Michael Emerson, vous savez le Benjamin Linus de Lost, dans un rôle pas si éloigné, en maître d’œuvre machiavélique et maléfique qui n’en a pas l’air (dans la pure lignée de Kayser Söze). Ici, il est Leland Townsend, lui aussi psychanalyste, officiellement, mais il œuvre dans l’ombre à la tête d’une légion de démons pour mener la guerre ici-bas. Il n’a de cesse de s’en prendre à David et surtout à Kristen qui semblent être des clés pour la réussite de son entreprise.

On a le droit à tout un bestiaire de créatures diaboliques qui ne font pas vraiment flipper tant elles sont ridicules, grotesques et donnent souvent lieu à des situations risibles. C’est un parti-pris et si on l’accepte, ce qui n’est pas si évident au début, cela se révèle très plaisant. Tous ces démons sont autant d’allégories des vices et dérives de notre société moderne, en vrac, les violences policières racistes, les dangers des réseaux sociaux, l’avidité des grandes entreprises…. mais qui se retrouvent in fine dans les antiques péchés capitaux, l’Envie, la Colère, l’Orgeuil, la Luxure….

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Ils sont aussi les émanations des plus grandes peurs enfouies au plus profond des personnages, les manifestations de psychés bien agitées.

Autour de ce défilé macabre se développe toute une galerie de personnages très intéressants et bien écrits, la mère de Kristen, le mentor psychanalyste de Kristen, le mari et les enfants de Kristen, une bonne sœur clairvoyante, différents pères de l’église, une nana hyper-cheloue dont s’éprend Ben, la sœur de Ben, Orson le tueur en série, un enquêteur du Vatican…

Tout cela fait de Evil, malgré ses défauts (dont elle tire une bonne part de sa force) une des belles séries du moment, élégante AVEC ses boursouflures, sérieuse sans se prendre au sérieux, bien tenue mais malade. Une énième variation sur le combat entre le Bien et le Mal mais plus subtile qu’elle n’y parait.

La série est diffusée sur Salto.

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