Fleabag, littéralement sac à puce, est une petite pépite – je n’aime pas ce mot mais ça fonctionne bien, parce que c’est petit et croustillant : 6 épisodes, 27 mins, ça s’avale en une bouchée. C’est signé BBC3 et Amazon. Court, irrésistible, un peu acide vers la fin.
Tragi-comédie filmée du point de vue de Fleabag, l’anti-héroïne moderne, celle-ci brise régulièrement le quatrième mur pour nous faire part de son ressenti en temps réel. Sans inhibition, douloureusement honnête, ce personnage navigue (très mal) dans sa vie privée et professionnelle, à notre plus grand bonheur.
Dans un Londres archi cher, Fleabag essaye de faire décoller son café à thème (le thème : un hamster) en vendant à prix exorbitant des sandwichs faits à l’arrache. Sa sœur parfaite, mariée à un collectionneur d’art, s’attend à ce que sa petite sœur échoue, mais de bon cœur. Brett Gelman, qui joue le mari en question, tient à la perfection son rôle de buveur mondain, souvent ridicule, et que Fleabag conseille régulièrement à sa sœur de larguer. Le père, remarié à la marraine des deux sœurs, n’arrive plus à allier vie de famille et nouvelle relation. Olivia Colman (déchirante dans Broadchurch) est ici délicieusement haïssable dans son rôle de méchante belle-mère.
Jouée par Phoebe Waller-Bridge (créatrice de la série, soit dit en passant), actrice très grande et presque maigre, notre héroïne communique aussi bien son mal aise à travers son corps que ses répliques. Cette série souhaite déranger, secouer un peu le spectateur qui trop souvent se prélasse devant un divertissement facile et bon enfant. Avec Fleabag, on gigote un peu dans son siège quand elle se penche vers la camera et qu’elle nous commente sa réalité. Gigotement de rire ou de gêne, ça dépend des fois.
Ce que j’aime franchement dans cette série c’est, bah tiens, sa franchise. On n’est pas là pour se faire refiler une comédie basique, mais on ne s’en rend pas compte tout de suite. Dans la liberté sexuelle et d’expression du personnage, on trouve un fond de détresse qui perce parfois à la surface. Subtile au début, sans cause on dirait, elle s’apparente plus à une névrose, une folie passagère non expliquée. Puis, l’histoire avançant, on comprend mieux, et ensuite complètement. De voir cette actrice passer de la nonchalance à la détresse avec le même talent pour les deux participe pleinement à la surprise du spectateur.
La série est tirée de la pièce de théâtre primée du même titre, par la même créatrice. Si ça c’est pas du talent … Trailer ici