Arthur Rimbaud a imité les grands maîtres, a voulu déplacer la poésie dans de nouvelles sphères idéologiques, l’a fait, a eu besoin d’une nouvelle forme poétique, l’a trouvée, a dit adieu, est revenu puis s’est tu. Il est alors au début de sa vingtaine.
La fulgurance et la précocité de Rimbaud comptent pour beaucoup dans sa renommée. Ses écrits, ses démarches, tout cela prend une ampleur démesurée pour avoir été réalisé si rapidement. Qui plus est, sa personnalité fascine toujours. Rimbaud, c’est à la fois un poète au visage angélique et un trafiquant d’armes. Le principal du collège de Charleville, où le jeune Arthur fut élève, a écrit à son propos : « Rien de banal ne germe dans cette tête, ce sera le génie du Mal ou le génie du Bien ». Les deux donc, comme tous ceux qui sont épris d’absolu.
La vie de Rimbaud contribue à sa célébrité bien qu’on ne dispose que de peu d’éléments le concernant. Quant à son œuvre, elle nourrit nombre de débats sans parvenir à accorder les « spécialistes ». Mais n’est-ce pas là la beauté de la chose ? On peut se perdre en spéculations sur l’histoire d’Arthur Rimbaud tout autant que dans sa poésie. Et bien qu’on ne s’accorde pas forcément sur les raisons, on s’entend pour dire que Rimbaud a laissé quelque chose de grandiose.
« La main à plume vaut la main à charrue »
L’œuvre de Rimbaud n’est nullement un projet défini. Elle évolue au grès des refus. Verlaine a surnommé « poètes maudits » ceux ayant ce point en commun. De ses premiers vers aux Illuminations, la production totale de Rimbaud tient dans un volume de poche. Pourtant, elle est d’une densité incroyable où Une Saison en enfer pourrait faire office de clef de voûte.
Une Saison en enfer est le bilan d’une expérience et participe à la naissance du mythe rimbaldien. Rimbaud passe à une poésie en prose qui est aussi un retour à une poésie narrative. Le « je » est biographique mais pas seulement. On est à mi-chemin entre une identité réelle et une identité fantasmée. Rimbaud crée sa propre mythologie. Les métaphores omniprésentes participent à densifier le rapport au mythe. Le narrateur assume-t-il être proche du Christ ou est-il son rival ? La conclusion de cette « saison » est qu’il faut renoncer au passé mais garder en tête que le passé peut revenir. Jusqu’au milieu du XX° siècle, on pensait que Rimbaud tirait un trait sur l’écriture avec son « adieu ». Or non, l’adieu n’était pas définitif.
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