« Il faut s’enivrer sans trêve », disait sagement Baudelaire. C’est un poète que j’admire beaucoup, alors dès que je peux, je lui obéis. Et je n’ai choisi ni la poésie ni la vertu, mais bien le vin.
C’est une musique douce et joyeuse. L’alcool et ses couleurs glougloutent, tournoient dans les coupes en verre avant de se figer, ne demandant qu’à être bus. Et nous cédons tous. Nous agirons et parlerons sans réfléchir. Mais l’abus d’alcool a cette faculté, bénie ou maudite, de brouiller les mémoires ; nous oublierons, comme d’habitude. Alors j’ai encore cédé cette nuit-là.
Breuvages en tout genre ont coulé à flots. Les cocktails colorés ont mille fois tenté, les culs de bouteilles ont mille fois raclé le cuir râpé du bar. J’ai oublié qui j’étais, un verre glacé dans la main. J’ai croisé des visages anonymes, je me suis perdue entre des bras inconnus. J’ai recherché une chaleur confortable, au creux de laquelle j’ai pu laisser mon âme engourdie vagabonder lentement. Et j’ai trouvé ça bon.
Après l’euphorie, le silence. La folie s’est tue, le rythme effréné de nos cœurs s’est calmé ; la vie dort en paix. Cette quiétude m’effraie. Les yeux ouverts dans le noir, j’écoute le grondement du monde.
Ainsi je me saoule d’alcool, de toucher et de vie, peut-être pour ne plus l’entendre.
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