Mars la Rouge. Tu connais? c’est la planète Mars. Elle est rouge quand on la regarde dans un télescope. C’est la planète de notre système solaire sur laquelle on suppose que la vie serait possible, car elle a une gravité supportable, pas d’atmosphère certes, mais probablement des nappes aquifères souterraines. Et tu sais bien que l’eau, c’est la vie….C’est donc naturellement la planète que choisissent les terriens pour aller installer une colonie scientifique. Le but est notamment d’exploiter les ressources minières de la planète puisque celles de notre propre planète sont depuis longtemps épuisées. On envoie donc une colonie de cent scientifiques (les Cent Premiers) pour aller explorer sur le terrain les secrets de la planète rouge et voir ce qu’elle pourrait apporter de bon à l’humanité. Des biologistes, des géologues, des physiciens…et à peu près toutes les variétés de chercheurs dont la participation à cette grande aventure a du sens.
Dès le départ, des antagonismes se font jour. Il y a ceux qui veulent coloniser la planète, lui donner une atmosphère et la peupler pour soulager la Terre qui est, comme chacun sait, un peu saturée. Il y a ceux qui veulent préserver Mars, la laisser telle quelle, ne pas la détériorer, comme un genre de parc naturel, patrimoine de l’humanité. Et puis il y a ceux qui veulent exploiter ses richesses pour les renvoyer sur Terre, vu que c’est pour ça qu’ils sont montés là-haut. Enfin, mais un peu plus tard, il y a ceux qui considèrent Mars comme une colonie terrienne, et ceux qui réclament l’indépendance de la planète.
Les années passent et d’autres terriens font le voyage. Des compagnies minières, des aventuriers, des entrepreneurs, des ingénieurs…bref comme au temps du peuplement de l’Amérique avec peut-être un petit peu moins de hors la loi…
Voila, je t’ai résumé en quelques mots le premier tome (Mars la Rouge). La saga totale en compte trois. La Rouge (on colonise), la Verte (on terraforme) et la Bleue (on s’émancipe)…et fait 3000 pages. Autant dire que ça ne se lit pas en deux jours. Il faut laisser passer un peu de temps entre les livres pour respirer, mais pas trop pour ne pas oublier qui est qui, qui fait quoi, qui couche avec qui, qui pense quoi de l’avenir de la planète…parce que c’est compliqué. C’est ce qui fait le charme de la saga, mais pas que.
La narration est découpée entre une vingtaine de protagonistes, un peu à la manière de GoT: l’action est centrée sur un personnage mais ce n’est pas lui qui raconte. Il y en a de tous les genres et de toutes les obédiences. Mais le personnage principal du roman, c’est bien sûr la planète, dont l’exploration est grisante. Il faut imaginer Mars comme la Terre en plus petit, mais aussi en plus gigantesque, l’exploration des chaines, pics, canyons, mesa, gouffres et cratères occupe une bonne partie de l’histoire et c’est bluffant. Le boulot de Kim Stanley Robinson n’est pas uniquement littéraire, il s’appuie sur des données scientifiques précises et pose des hypothèses réalistes. C’est de la Hard SF, du sérieux romanesque.
L’aventure couvre plusieurs siècles, mais on reste toujours avec les Cent Premiers car l’une de leur première découverte a été un traitement qui prolonge la vie (sauf mort accidentelle)…
Roman passionnant, mais aussi un peu ardu. L’auteur passe régulièrement du décompte en années terrestres à celui en années martiennes (plus courtes), ne donne pas d’indications chronologiques (combien d’années sont-elles passées entre deux chapitre?), ne fait pas de résumé des événements qu’on ne vit pas (l’arrivée des sociétés minières, la fondation d’une ville sont constatées sans être décrites) et ne donne pas de carte qui permette de localiser précisément l’action (à part un vague dessin merdique en début de tome). Au début, ça va parce qu’il suffit de se référer à ce qu’on connait de Mars, le site de la Nasa, les fan-sites, mais au fur et à mesure que la planète se peuple, que des villes se construisent, des mers émergent…le visage de la planète change et on est un peu paumés. Ce n’est pas grave, mais c’est pénible.
Robinson choisit aussi de raconter l’histoire d’un côté de la barrière et ne donne pas les points de vue antagonistes. Il se perd parfois en descriptions interminables sur un événement (comme par exemple un symposium où les rebelles décident de l’avenir de leur planète dans Mars la Verte) puis saute sans vergogne dix ans plus tard, sans prendre le soin d’expliquer ce qui s’est passé pendant ce laps de temps!
Saga planétaire, roman complexe et original….la saga martienne c’est tout ça. Il faut s’armer de patience pour en venir à bout, mais c’est une expérience.