Je clique sur play et le petit piano se met à jouer tout seul. C’est au bureau et en l’absence des chefs, nous nous laissons aller à quelques fantaisies. Je demande toujours à mes collègues ce qu’elles veulent écouter. « Comme la dernière fois ». C’est par facilité et aussi parce qu’elles ne connaissent pas beaucoup de musiques différentes. C’est comme faire ses courses et aller toujours vers les mêmes aliments. Toujours des courgettes, toujours des pommes. Rarement des patates douces, rarement de la goyave. Il y a des rapports à la musique très particuliers quand on ne sait pas que la musique est un art qui grouille. J’aime ce qu’elles aiment. Je suis touchée par Michel Polnareff, je chante du Jean-Jacques Goldman, je braille sur Daniel Balavoine, je me délecte de Mike Brant.
Mais parfois entre deux tubes génération Salut les copains je programme dans le juke-box du bureau, quelque chose qu’elles ne connaissent pas. C’est toujours Monique qui demande ce que c’est. Odette se contente de dodeliner sur John Coltrane comme sur Johnny Hallyday. L’autre fois, je l’ai entendu fredonner sur Austra. Monique m’a dit avoir acheté un CD laser de Lou Reed et Josiane aimerait participer aux Nuits Sonores l’année prochaine. Je quitte bientôt cette entreprise et je sais que la musique ne jouera plus dans l’open space après mon départ. Il faudra que je pense à leur envoyer quelques liens de temps en temps. Il faudra que je pense à leur montrer comment allumer les enceintes de leurs ordinateurs.