NOÉ – Pour la cruauté des hommes (BD)

Si je traite aujourd’hui, et ce pour la première fois, d’une bande-dessinée, c’est parce que son auteur est tout simplement un réalisateur très peu connu du grand public. Il n’a tout simplement réalisé que PI, Requiem For A Dream, The Fountain , The Wrestler, et tout dernièrement Black Swan, j’ai donc nommé Darren Aronofsky.

J’ai écris « son auteur », mais à vrai dire il y en a deux, lui et Ari Handel. Et le dessin et les couleurs reviennent à Niko Henrichon (mais je ne me consacrerai, ici, qu’exclusivement au scénario).

Ari Handel n’est pas totalement inconnu au bataillon puisqu’il a co-écrit, avec ce réalisateur, l’histoire qui a servi de base au film The Fountain. Il y a deux points communs qui sautent évidemment aux yeux, il est affaire de mysticisme et cette histoire (Noah en anglais) est prévue pour être adaptée au cinéma.

A leur vision, j’ai toujours aimé les films d’Aronofsky, et avec le temps, quelques préférences me sont apparues naturellement. Mais je garde toujours en tête que c’est l’un des auteurs-réalisateurs les plus doués de sa génération. Dès son premier film, il a su imposer un style qui lui est propre. À savoir une mise-en-scène minutieuse et qui n’est pas simplement une mise-en-image d’un scénario, elle a un véritable sens. Elle est également radicale : quand il veut faire ressentir quelque chose, il n’y va pas par le dos de la cuillère. Et il n’hésite pas à creuser à fond son propos : il sait garder une règle de conduite afin de ne pas sortir, par quelques digressions inutiles, de son histoire.  Il s’agit  de personnages blessés, se dirigeant tout droit vers la folie ou la mort, ne combattant pas pour d’autres ou à peine, mais pour se sauver de leurs propres démons. À l’exception de The Foutain, et encore, il suffit d’étendre ce principe à un couple avec l’un des deux dans ces ténèbres, et l’autre dans une lumière éphémère tentant d’éclairer le premier.

Après ce constat, mes premiers doutes surgissent après avoir lu le tome 1 de cette BD.

Or la première planche est vraiment forte : la main d’Eve qui arrache la pomme de l’arbre de la connaissance. Puis en une ellipse, qui n’est pas sans rappeler 2001 L’odyssée, nous passons à la main d’un homme tenant une pierre taillée qu’il brandit… pour tuer un homme. Adam et Eve ayant eu accès à un outil : la connaissance dans le jardin d’Eden.

Noé, descendant d’Adam et Eve donc, vit l’enfer sur terre. C’est un décor ravagé, une sorte de désert où nous y voyons pourtant des restes de civilisations. Il n’y a plus qu’une cité, Bab-Ilim avec sa tour (la tour de Babel en plein antagonisme gnagnagna) ; celle-ci arrive bien après l’apocalypse de Noé dans le livre de La Genèse. Cette tour nous prouve simplement qu’il est encore question  de connaissance. Tout comme ce qu’il arrive à notre Noé international, avec ses visions qui m’ont fait penser au film Valhalla Rising, bien qu’elles soient concentrées sur le déluge qui va arriver. Il se demande, sans cesse, ce qu’elles peuvent dire (pas très malin pour un mage) et une fois qu’il a compris, il se demande ce qu’il faut faire…

Alors après ça, on se demande légitimement si c’est « La Genèse Pour Les Nuls » ou quoi ? Et bien on y est un peu, et pas du tout à la fois. Aronosfky et son comparse Handel, sont en train de proposer une vision particulière  de La Genèse chapitre 6 avec une véritable histoire, des antagonistes, une morale comme c’est pas bien de tuer les animaux juste pour leur cornes, des monstres mais des qui sont sympas en fait, etc…

Mais il y a surtout deux choses qui m’énervent le plus, à la fin de cette lecture, c’est se sentiment d’être pris pour un gamin de 10 ans à qui il faut faire vraiment attention à ce que l’on raconte, et surtout à ce que le montre, pour ne pas qu’il fasse des cauchemars épouvantables… Et cette incroyable frustration après la dernière page tournée : quoi, c’est tout ???

C’est donc bien la première fois que monsieur Aronofsky m’énerve. Je suppose qu’il va aller jusqu’au chapitre 9 de La Genèse, et j’espère sincèrement que dans les 3 tomes qui vont suivre il va encore plus s’écarter de ce « livre » pour créer une œuvre personnelle. Car en connaissant son potentiel, pour l’instant, on ne peut que s’interroger sur le pourquoi d’une telle BD, d’autant plus qu’elle risque d’être portée sur grand écran…

Je garde néanmoins bon espoir : il s’est donc, comme je l’ai déjà expliqué, légèrement écarté du « livre », mais je pense aussi qu’un plan en 3 actes, comme dans un scénario, se profile : présentation de la situation de base, description du personnage principale, de ses alliés et de ses antagonistes, et premier nœud dramatique qui lance les péripéties (ça c’est le premier acte, et c’est celui qui se trouve dans ce tome 1). Je suppose donc que, si cette BD est bien construite comme un scénario de long-métrage, dans les deux prochains épisodes, nous aurons le droit au deuxième acte avec les péripéties : le protagoniste tentant d’atteindre son but avec les antagonistes souhaitant l’en empêcher ; jusqu’au second nœud dramatique qui pousse l’action dans un autre sens (avec par exemple une mort physique et / ou spirituelle du protagoniste). Et le dernier acte, qui sera situé à la fin du tome 3 ou en début du dernier tome, avec son climax, et enfin le dénouement. Et tout cela avec une relecture de 4 chapitres de La Genèse.

Enfin voilà, demi-déception en lisant ce tome 1. Allez plutôt l’emprunter à la bibliothèque du coin. Je pense, enfin j’espère énormément, que mon impression va changer dans l’épisode qui va suivre. Malgré tout, si il se décide vraiment à l’adapter au cinéma, on sait déjà que ce pourrait être son œuvre la plus ambitieuse.

Vu que la mode est à la bande -annonce pour des livres ou BD, je vous la mets quand même :

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