J’ai récemment écrit un livre, puis plusieurs, qui ont tous connu un succès immédiat : Chaque membre de ma famille possède son exemplaire dédicacé, bon nombre de mes voisins s’en servent pour maintenir leurs tables bancales ( et n’ont pas manqué de me féliciter pour leur efficacité ) et j’ai moi-même pris la peine d’en acheter une trentaine.
Afin de me rapprocher au mieux de la gloire qui m’attend, et de me préparer au carton que fera surement ma prochaine œuvre, j’ai décidé de lister ce qui fait qu’un livre ne prendra pas la poussière dans la partie « antiquités » de la Fnac, et se retrouvera au contraire fièrement aux cotes d’autres hits de la littérature.
Toutefois, n’ayant eu le temps de consulter aucune étude traitant de la question, et n’ayant plus assez d’argent pour acheter de livre faisant autorité sur le sujet, mon argent étant entièrement passé dans mes propres bouquins, jai du faire appel a mon propre bon sens.
– Un personnage principal.
Pas trop beau sinon ça rend jaloux les hommes, mais pas trop hideux pour ne pas ennuyer les femmes. Le chic c’est qu’il soit légèrement con sur les bords au début de l’histoire, comme Santiago dans l’Alchimiste, c’est pratique pour le faire évoluer et lui faire découvrir des choses. C’est encore mieux s’il est puceau, ca donne un côté attendrissant. Tu peux l’appeler comme tu veux, mais mieux vaut que ce soit simple, a moins que tu veuilles t’amuser à écrire Jean René Patrick de la Motte Picquet Grenelle Saint Brice tout le long de ton livre. Ah et au maximum essaye de pas préciser son origine, ses opinions politiques ou son sandwich préféré chez McDonald’s, tu risquerais de perdre des lecteurs bêtement.
– Une histoire d’amour.
Ton héros est puceau, donc forcément c’est pas un champion de la drague. Le mieux c’est une histoire d’amour qui lui tombe dessus, puis c’est le plus simple à mettre en scène : Un regard, le temps qui s’arrête le coeur qui se met a faire du beat-box et le tour est joué. Si t’es a court d’idées tu peux même en faire le clou de ton histoire, genre la meuf de ton héros qui se fait enlever par un mec qui veut devenir le maître de l’univers et celui-ci qui s’paye une expédition pour la délivrer ( Y’a pas tellement de rapport entre l’enlèvement et le fait de devenir maître du monde mais ça a marché pour d’autres donc ça devrait aller pour toi ).
– Un méchant.
Tu peux la jouer soft et faire un être humain qui a des plans de domination du monde du genre créer une élite d’hommes a tête de pelican, ou aller plus loin et faire un mec qui se serait retrouvé coincé dans un incident nucléaire et qui aurait finit avec 12 bras télescopiques, ou la faculté de se transformer en poule.
Pour le nom mieux vaut un nom qui fasse méchant histoire de planter le décors tout de suite, un truc du genre Crapulito ou Monsterman.
Pour la pointe humour tu peux lui flanquer un assistant bossu qui lui servira de tête de Turc auquel il pourra faire faire un tas de trucs a la con genre visser une tête de chien sur un chat.
– Des péripéties.
T’as le champ libre, mais mieux vaut foutre des petites galères sur la route de ton héros, une histoire qui arrive tout de suite au combat final et a la scène du baiser, c’est une histoire morte-née ( ou c’est le Horla de Maupassant ).
Le mec peut se faire voler son portefeuille, enlever par une bande de pirates, se perdre dans une forêt. Il peut être accompagné de son fidèle ami, ça peut être un humain, mais en général un oiseau ça marche bien, bien entendu, tu peux le faire parler pour le petit coté exotique.
C’est aussi ces péripéties qui feront que ton héros retiendra des leçons et deviendra intelligent, par exemple un combat acharné avec un cyclope qui lui apprendra qu’il ne faut pas jeter les bébés cyclopes du haut d’un arbre.
Voila, tu as maintenant en main tous les ingrédients pour écrire pour révolutionner le monde de la littérature. Ne me remercie pas, une petite part sur tes bénéfices futurs suffira.