Ferme là. Ôte ce rouge à lèvres.
Tiens, démaquille moi ça. Je veux ta bouche, ta peau, nue. Tu protestes, c’est pas tes foutus cotons, mon t-shirt est encore bien assez bon pour toute cette graisse rouge sur ta bouche, frotte. Pas envie de bouffer tes cosmétiques. Prends un verre, détend toi. T’es tirée par les nuits où tu dors pas, je t’entends tu sais, à côté de moi tu respires plus fort. Moi je regarde le plafond, mon cœur cogne dans ma tête c’est le bordel alors je me calme je me fixe sur un truc, la lézarde que je suis des yeux, je connais son chemin par cœur tu penses. Et y a du Jack sur la table de nuit, j’en prends un peu et ça me fait du paradis brûlant dans la bouche, caramélise mon œsophage, gonfle mes poumons… Label nuit. Parce que je pourrais pleurer tellement on est là. Ou pas là au fond je sais plus où on est. Tu m’as dit l’autre jour « je sais plus ce que je ressens au fond » et j’ai dit « pourtant huit centimètres en moyenne c’est pas si évident de pas savoir » je faisais le con et t’as boudé avec tes bras sur les yeux.
Danse pour moi.
A moitié à poil, comme t’es ouais. Je veux tes hanches qui ondulent, tu bouges comme une pute, comme une adolescente défoncée, c’est terrible et minable à la fois. Ça ferait même pas film de boules, ou alors une prod’ d’amateurs dégueulasse avec des sacs plastiques dans le champ et des lumières pourries. Je me sens crade d’aimer ça. Approche toi, donne moi ton bras. La peau est blafarde, tu sors pas assez. J’aimerais bien que tu te dores au soleil comme une fille de pub avec les cheveux brillants et les yeux plein de cils – tu éclaterais tellement de santé que je t’emmenerais à Copa Cabana pour que tu sois bien raccord avec le décor, ici les jours sont gris et les plafonds trop bas- mais tu m’écoutes jamais, tu dis que t’as pas la carnation pour ça, qu’est ce que j’y connais moi en carnation je m’en fous tu fais jamais ce que je te dis de faire c’est bien tout ce que je vois. Tourne toi salope montre moi encore comment tes fesses vivent avec la musique. Je veux encore mater ton cul avant de le défoncer. Le sexe comme trait d’union : j’ai tout ton corps au bout de ma queue, tu es mienne et c’est les montagnes russes. Tes fesses bloblotent en chœur, des petites montagnes de gelée, avec des cratères sous le coton de ta culotte. Elle te marque, ça fait des lignes rouges incrustées, et ta cellulite s’arrange pas, tu boufferais moins aussi… T’enfournes comme une vache, tu engouffres et tu t’enfiles. Des queues aussi, peut être quand je suis pas là, je suis sûr que tu le fais. Des grosses, des petites, des moches, des puantes, des rouges, des noires. Je suis certain que tu baises sans arrêt avec des types que je connais pas ou ce serait horrible des que je connais, c’est sans doute ce qu’il y a de pire tu les croises tous les jours et ils connaissent le trou de ta femme aussi bien que toi, ils l’ont léchée pilonnée aspergée. Ils viennent et ils écartent ta culotte un peu savoir si t’es humide, ensuite ils te mettent à genoux et t’aimes ça hein, oui t’aimes ça. Tu dois en bouffer des kilomètres, de bites purulentes, bandantes, esseulées, des types qui crachent dans ta bouche pour quoi? Pour quoi au fond hein? Déconnecter le cerveau une dizaine de secondes, te trouver à genoux, pourrie jusqu’à la moelle, mon amour, mon enfant vicieuse, mon astre changeant. Je suis jaloux oui de tout ce que tu dis, ce que tu fais. Ce que tu ne dis pas quand tes yeux chavirent et que ton sourire s’éteint.
T’aimais ma poésie à un moment.
Je gueulais à pleins poumons tout ce que je pouvais trouver de plus beau comme mots, et ça te faisait marrer, mon idiote congénitale, ma garce, mon trésor. Je trouvais ça trippant, et les voisins gueulaient aussi, mais on s’en foutait on était mieux qu’eux, nos élans la nuit étaient les plus incroyablement fulgurants, on n’a jamais été aussi vivants, on était des dieux ignobles. Pour me faire taire tu prenais ma bouche, on se roulait des galoches monumentales et la lune était torve et glabre. File moi ton bras, ma cancereuse, miettes de tabac sur la langue, du fort de l’amer du brun, comme tout ce que tu remues et fais naître, entre mes doigts la clope finit de crever. On y arrivera tous, on crèvera comme des chiens les entrailles au soleil, la gueule en délire. Je tiens ton bras qui ressemble à rien, mon index et mon pouce en pincent pourton poignet, j’appuie là où ça fait mal, j’écrase la cigarette en plein milieu c’est tendre. J’aurai du mieux choisir, okay, c’est pas assez puissant, ça vrille pas bien je vise le creux de ton coude. Chhhhh! T’entends comme elle te baise ma clope? Te faire mal encore pour t’atteindre un peu, t’es si amorphe parfois que ça me fait peur. Une veine bleue pleuviote doucement, j’appuie fort. Gueule pas bordel, gueule pas. Je pose la main sur ta bouche, tu me mords, mais qu’est ce qu’il te prend…
Tu comprends pas, tu comprends pas que je t’aime et que ça me rend taré, alors que t’es rien, une fille de caniveau, un truc que j’ai ramassé un soir de défonce, il pleuvait sur ma Golf et sur toi, le parking hurlait au dévidoir, t’étais bien contente de trouver des bras et une queue, tu l’as aimée tout de suite. Tu me l’as dit plein de fois. J’avais des capotes sur moi, tu disais que c’était pas grave, je t’ai giflée et puis on a fait l’amour, c’était fou et mortel. Ça paraissait démesuré de t’avoir ramassé comme ça après qu’un quelconque connard t’ait laissée sur le bitume, de t’avoir instantanément bouffée du cœur comme si on était des gosses et qu’on savait pas que l’amour c’est une engeance dont vaut mieux pas s’empêtrer.
Et maintenant tu pleures, pourquoi?
Moi, ça me rend dingue d’imaginer tous les instants où t’es pas avec moi. Et plus encore ceux où t’es avec moi. Flip total de te voir, poupée shootée d’amour et de rien, avec tes cheveux jaunes mal décolorés, tes dents écartées, on dit dents du bonheur je crois je m’en fous. Le bonheur on peut pas savoir ce que c’est quand on s’aime comme ça c’est trop intense et profond: ça fouaille les tripes ça me fait vomir d’ailleurs la voilà la nausée elle monte, pousse toi. Je me déverse à côté, mon dégueulis vert bouteille constellé de jaune, éclabousse tes chaussures de pouffiasse bon marché. Je suis pourri, je suis mal, je suis rien qu’une loque. Un verre. Je veux un verre tout de suite. Viens, on se bourre la gueule, j’ai du Jack encore, c’est pas trop tard, dis moi que tu m’aimes. T’es belle comme ça, tu pleures ton rimmel fait des rivières noires sur tes joues, y a des traces plus claires pour les larmes, ta bouche comme une crevure sur ta peau étrange, tes narines frémissent comme celles des chevaux, je bande tu sais, regarde donne moi ta main. Oublie ce que j’ai dit, t’es la plus belle de toutes les nanas que j’ai connues, t’es belle dans les défaites et dans l’injure, sous les coups et l’ivresse. T’es belle à l’heure où se chauffent les lampadaires, quand ils flaquent sur les trottoirs leurs reproches silencieux, tu vois je recommence à t’inventer de la littérature. Je devrais pas, t’es pas comme elles, les autres il leur faut des jolis éclairages, des bougies et des robes et des fleurs des mots doux des conneries de déclarations pas toi toi tu vaux mieux. T’es belle quand t’as mal, quand t’es au bord de la rupture, tes yeux sont injectés de sang, tes cheveux éructent et tes bleus sur la peau sont des tatouages uniques et éphémères, ma catin ma reine et mon ange. Je veux qu’on soit toujours ensemble, mêlés comme urine et merde, fièvre et sang, bubon et pus. Si tu me quittes je me tue, ou je te tue. Non, toi je te tue et après j’en crèverai. Regarde c’est facile, tu vois mon gun, je le poserai là, sur ta poitrine. Y a déjà une cicatrice en croix pile entre tes seins je sais plus si c’est moi qui t’ai fait ça, on croirait qu’elle est faite pour servir de cible non? Je le pose, tu sens le canon froid sur ta peau, arrête de chialer nom de dieu, de quoi t’as peur, pas de moi: c’est parce que je t’aime plus que je ne peux le dire que je fais ça c’est inhumain d’être aussi submergé, c’est toi, toi, ta faute, putain! Je ne hurle plus regarde, je suis calme si je me concentre assez mon cœur ralentira comme les sportifs. Mon index presserait la détente trois deux un tu vois c’est facile, regarde comme ça, non on joue pas. On ne joue plus. J’ai jamais joué ma douce, ma suceuse, ma roulure. Le coup est parti elle était pour toi, cette balle, c’est forcé je plaide coupable votre déshonneur.
Y en a partout sur mes doigts. Hémoglobine en étoiles filantes poisseuses sur mon torse. Et mon jean je le filerai à la blanchisserie je savais pas que ça eclabousserait autant. Le pire doit être les éclats d’os si blancs au milieu de l’écarlate : c’est presque beau. Tu me surprendras toujours mon amour.
Je reprendrais bien un Jack.