Le vent n’a pas raison des secrets
« Cette auberge, c’était le refuge à atteindre après des heures dans le vent. Sur la fin, un joli mur de pierres plates bordait le sentier. A cet endroit, la terre était souple, recouverte d’herbes rases. L’auberge était toute proche. Le sentier se poursuivait encore, après, plus loin, la pointe des Becquets, le Bec de l’Ane. J’aurais pu continuer, filer au sud, on disait que du côté de Biville, la côte était belle. La plage. Les dunes.
J’aurais pu aller à Carteret.
Je m’en foutais des dunes.
Je ne voulais pas aller ailleurs. »
La Hague. Dans cet endroit du bout du monde, c’est le vent qui rend fou. Les tempêtes sont de véritables évènements, en elles-mêmes et en ce qu’elles prennent par la mer, ou rendent sur la plage. Certaines personnes ne rêvent que d’en partir. D’autres y resteront toute leur vie.
S’il y n’en avait qu’un, ces derniers mois, ça serait celui-là : « Les déferlantes ».
Notre héroïne travaille là, pour observer les oiseaux. Un travail, comme une fuite. Elle est en recherche de solitude, d’elle-même, en deuil. Elle croit sa vie terminée, et souffre plus encore de ressentir de moins en moins sa perte. Notre récit commence alors qu’une tempête menace. Assise à la terrasse d’un café, elle rencontre un homme, Lambert. Au départ, on le prend pour un étranger, mais très vite, on découvre qu’il venait la tous les étés, quand il était petit. Il a perdu toute sa famille dans un naufrage, et c’est ainsi qu’il revient, pour vendre la maison de vacances de la famille, mais aussi pour découvrir la vérité sur ce naufrage qui l’a rendu orphelin. Elle, elle commence à s’intéresser à lui, à travers son histoire. Elle glanera des informations dans le village ici et là, au fur à et mesure de ses rencontres. Et c’est quand Lambert aura ses réponses, que la vie sera de nouveau possible.
« Une part de ciel », m’avait été offert par ma mère. Celui-là, elle me l’aura conseillé. Comme je sais désormais que je peux lui faire une confiance aveugle, j’ai gardé cette lecture pour un moment où j’en ai eu besoin, comme un livre pour les coups durs.
Les phrases courtes, auxquelles je suis habituée désormais ont rythmé ma lente lecture. Les descriptions de paysages ont décidé de ma destination de vacances cet été : La Hague. Un endroit où l’on aimerait se réfugier, où la météo elle-même devient un personnage capricieux. Les villageois rencontrés sont secrets, plus ou moins âgés, dans une France qui parait un autre monde. Ils sont là, ils papotent au coin d’une rue, du sujet qui les fait vivre, ils font partie du décor. Et puis le récit est doux, quelque peu troublant parfois et il vient comme un bain très chaud après avoir longtemps marché, en hiver, dans le froid.
Et je ne dis pas cela souvent.
« La Hague, quelques heures avant la pluie. Un temps d’orage. Ma peau devine l’odeur du souffre. Elle a toujours su. Elle sent venir la foudre des heures avant que les éclairs n’éclatent.
Il en est ainsi des peaux.
De certaines peaux. »
Titre : Les déferlantes
Auteur : Claudie Gallay
Editeur : J’ai lu (grand format : Les éditions du Rouergue).
ISBN : 978 2 29002487 4