Produite par Jenji Kohan (Weeds, Orange Is The New Black), la saison 2 de Glow est disponible sur Netflix depuis début Juillet. Cette série – très imprégnée par la mode actuelle d’un revival des 80’s – nous raconte l’histoire d’un show TV scénarisé sur des personnages de catcheuses : The Gorgeous Ladies Of Wrestling. Au-delà d’un retour à la VHS dans une ambiance “juste-au-corps et New Wave”, cette série n’en est pas moins un spectacle féministe qui s’accapare un sport masculin réservé d’habitude à la testostérone patriotique.
A Los Angeles, dans les années 80, Ruth Wilder (Alison Brie) est actrice de métier. Elle tente de réussir en aspirant à de grands rôles dramatiques. Dans la saison 1, et très vite, la réalité la rattrape : Ruth n’a pas de talent. Comédienne au chômage, les seules propositions qu’on lui fait se limitent à des rôles dans des productions pornographiques.
Jusqu’au jour où son agent la contacte pour faire un essai dans “Glow“, acronyme de “Gorgeous Ladies Of Wresting“. Tel que son nom l’indique, Glow est une émission de variété centrée sur le catch féminin. Enregistré en public, ce show est destiné à être diffusé sur une petite chaîne câblée américaine le samedi soir. Son réalisateur, Sam Sylvia, est lui-aussi une sorte de looser dans le milieu du cinéma. A bientôt cinquante ballets, ce célibataire endurci – qui a pour coutume de coucher avec ses actrices – n’a réalisé que des films de série Z. Pourtant, il a toujours aspiré à faire de grands films bankables et “oscarisables”…
Ruth vient-elle de passer une audition pour un vulgaire show TV sur le catch féminin ? Que nenni. Elle se découvre une véritable passion pour ce sport, entourée par une bande de nanas toutes plus marginales les unes que les autres. Dans la première saison, chacune d’entre elle va se construire un véritable personnage de théâtre. De la même manière, chaque épisode de Glow (le show TV) va permettre au spectateur de suivre l’histoire de chacun de ces protagonistes. Les combats sont scénarisés et permettent peu à peu de fomenter une intrigue relativement kitsch.
Ruth incarne Zoya la destructrice, véritable cliché de la femme bolchevique et de l’U.R.S.S. Par définition, elle s’oppose à Liberty Belle, incarnation stéréotypée des valeurs américaines et de “l’American Way Of Life”. Petit à petit, nous découvrons également d’autres personnages qui font office de caricatures : The Welfare Queen (“La Reine des Allocs“), Beirut (terroriste originaire du Moyen Orient), Brittanica (l’intello de nationalité anglaise)… Toutes ces catcheuses – qui représentent des pastiches de notre société – vont peu à peu connaître le succès auquel elles prétendent à travers un show TV réactionnaire et populaire. Elles parviennent à se faire un nom par le biais d’un programme truffé de misogynie patriotique et de préjugés sur les femmes.
Il est évident que cette série joue sur des stéréotypes et des clichés raciaux pour mieux les dénoncer. De la même façon, les deux saisons jouent également sur des valeurs sexistes et machistes afin de bousculer les codes et les schémas homme/femme.
Néanmoins, et bien que Jenji Kohan soit plutôt adepte des critiques virulentes de l’Amérique, Glow reste en surface et ne va pas au bout de son idée. La série relate un féminisme mou au détriment d’une esthétique 80’s qui prend le dessus. Comprenez : Netflix surfe sur la mode du revival et des références pour sur-vendre une série originale.
Il suffit pour cela de prendre la majeure partie des héroïnes de Glow. La plupart d’entre elles (à commencer par Ruth) obéissent à nos canons de beauté standardisés pour plaire à une certaine clientèle masculine. De même, et dans leurs juste-au-corps taillés sur mesure, tous ces personnages sont “sexualisés” gratuitement afin de rentrer dans une norme corporelle de beauté (mis à part quelques catcheuses secondaires).
En fin de compte, le message de Jenji Kohan se perd dans une ambiguïté latente. La série donne ce sentiment diffus de vouloir plaire à tout le monde : être politique sans froisser les classes dominantes, être féministe sans être radical, être sexy mais pas porno…
Il n’en reste pas moins que Glow demeure une série attachante, idéale pour combattre la canicule et pour passer l’été au frais. Dans la saison 2, chaque héroïne accomplit son chemin d’émancipation personnel ; le féminisme (quel qu’il soit) prenant le pouvoir à travers le sport de combat. Enfin, les enjeux dramatiques se diversifient dans cette seconde fournée d’épisodes, délaissant le collectif de catcheuses pour mieux affirmer les caractères de chacune…
Tel un excellent bourbon qui s’affine, et dont la maturité pourrait parvenir lors d’une éventuelle troisième saison…
J.M
“Au cœur de l’ambiguïté du cinéma américain n’y a-t-il pas précisément sa capacité exceptionnelle à rendre séduisant ce qu’en apparence il condamne ? À courtiser les opprimés en même temps qu’il donne raison à ce qui les opprime ?” (Noël Burch)
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