Par A girl call george
Assise au bord de son lit, elle regarde derrière son épaule une fille qui dort depuis quelques heures. Elle essaie de se souvenir du début de l’histoire et tire dans sa mémoire les fils qui expliquent la présence de cette silhouette pale et maigre qui respire paisiblement.
Elle envisage de se barrer boire un café et de laisser le temps nécessaire à cette fille pour se réveiller, s’ennuyer, prendre ses jambes à son cou.
Les jambes, le cou d’Alice, combien de temps les réminiscences fatiguées d’une nuit passée à faire de l’amour triste et blasé se rappelleront à elle?
Elle donne deux jours à tout cela pour s’évanouir.
Des frottements mécaniques et égoïstes qui mènent au mensonge d’une jouissance feinte comme pour arrêter le massacre.
De la peau, des creux, des courbes qui ne s’épousent pas, qui se contredisent, qui s’échinent à mener à rien.
Elle s’envoie des litres d’eau glacée sur le visage pour se sortir la gueule du cul. Elle est froissée comme une lettre fâcheuse que son destinataire aurait nerveusement pétrie. Elle a une tête de mauvaise nouvelle qu’on balancerait à la corbeille après l’avoir réduite en boule. Elle bloque une longue minute devant le miroir, sourcils froncés, cernes violacées, elle approche au plus près de son reflet.
Elle s’imagine que c’est une inconnue qui lui fait face, la jeunesse perdue ressuscitera un peu plus tard sous une couche de maquillage que le temps a fini par rendre impérative.
Le miroir persiste à faire des mauvaises manières, il a clairement envie d’avoir une conversation sur son age.
Zelda ,n’est pas partante pour être son propre sparring partner et détourne les yeux de ses trente ans qui la lorgnent en ricanant.
Elle charge la cafetière de ce qu’il faut de courage noir pour oublier cette nuit quasi blanche et prend une cigarette dans un paquet de camel souple.
Un paquet souple pour accompagner son physique d’une attitude, au même titre que la moue de ce matin, les mâchoires serrées, les joues creusées, les mèches qui s’échappent avec désinvolture d’un chignon négligé.
Toute cette mise en scène d’aspirante heartbreaker, une froideur de façade pour compenser un sentimentalisme qui lui tord le bide la plupart du temps et ne la laisse tranquille que lorsqu’elle convainc dans son rôle de salope sans coeur, comme hier soir.
Elle appréhende le réveil de cette nana de hasard et se refait le film tellement commun de leur rencontre en écrasant sa première clope qui en appelle déjà une autre.
Le parquet craque doucement comme sous les pas d’un chat trop lourd ou d’une fille trop maigre.
Alice s’approche derrière elle, griffe son crane sous des cheveux en friche et embrasse sa joue, une bise vide qui les laisse toutes les deux fermement indifférentes.
Zelda demande comment elle va.
Bien.
Alice demande si Zelda est vraiment son prénom.
– Oui
– Comme le jeu…
– non, comme le prénom
Elle lui file un slip et un tee shirt qui n’ont pas d’importance et qu’elle peut abandonner au hasard.
Alice annonce qu’elle part bosser.
Où? Qu’est ce qu’elle y fait?
Des questions courtoises qui ne seront pas posées. Il ne s’agit pas d’un manque d’intérêt mais d’une volonté obstinée de ne pas en attendre davantage de cette fille, de cette nuit, des quelques phrases échangées…
Un baiser superficiel et terne claque sur le pas de la porte. Elles se sourient comme on sourit à la boulangère, rapport social convenu.
Elles se sourient comme des filles qui ne se reverront jamais, comme des filles amoureuses d’une autre qui ont choisis de mettre un terme au sommeil de leurs corps sans talent ni efficacité, comme des filles brisées.
john
great ! again !