Par A girl call george
C’est un matin comme un autre, peut être un peu plus frileux, un peu plus gris.
Le courage est revenu comme la sève dans un arbre mort.
Comme des paillettes magiques lancées sur un désastre mouvant, quelque chose qu’elle ne peut pas expliquer rationnellement.
Zelda, ravagée mais debout, a senti se craqueler le bourgeon de chagrin trop étroit dans lequel elle venait de passer des mois avant d’éclore.
C’est un de ces matins discrets, que rien ne différencie d’un autre, qui a vu Zelda regagner la berge, échapper aux eaux de noyade, réapprendre à nager.
Elle a tendu ses muscles dans un lit propre et sain, elle se tortillait, heureuse de sentir l’échauffement de ses mollets, cuisses, fesses, chaque muscle bandé la ramenait à la surface plane d’une vie élémentaire qu’elle avait perdue de vue.
On/Off.
C’est comme ça qu’on passe du chagrin au courage se dit-elle en jouant avec une mèche de ses cheveux.
Après des mois à sonder les abysses dans une solitude totale, à éviter les rues, les disques, les films, les couleurs, tout ce qui lui rappelait qu’elle avait été vivante avant d’être une marionnette manipulée par le désamour, une ruine dormante au charme mort.
Enfin, l’air est devenu respirable.
On/Off.
Ses muscles chauds, les frissons de sa peau, l’envie tapie dans son sexe avide, comme autant de signes qui lui confirment que la vie est de retour et affleure sous sa peau, ses nerfs. Une conviction viscérale, la confiance tranquille qui se déplace et gonfle d’une heure à l’autre.
Elle a abandonné sans même s’en apercevoir les supplications, les prières muettes et moites qui la tenaient éveillée jusqu’à ces matins bleus qu’elle a observé depuis la fenêtre de sa chambre.
De son corps, il ne restait qu’une carcasse dépouillée de sa graisse.
Allongée sur le lit, elle soulève son tee shirt et regarde respirer son ventre en faisant des ronds autour de son nombril avec l’index.
Elle considère son visage, lavé, lassé de tristesse, lissé par les promesses rassurantes d’une aube sans lumière mais néanmoins étincelante.
Elle se glisse dans une robe fluide, attrape ses lunettes noires et son sac. Elle donne un tour de clefs avant de s’engouffrer au pas de course dans la cage d’escalier. Sa démarche comme une danse l’emmène sur une place où perce un rayon guerrier. Sa silhouette se découpe nettement, elle sort du lot des passants pressés, elle est la fille qui a le temps, elle est la fille qui marche lentement, elle est la fille qui porte bonheur.
Elle ressent une profonde sécurité l’envelopper, comme un animal qui aurait trouvé la planque idéale après des mois de traque.
Elle est restée discrète à écouter des conversations, des bribes. Cette pratique a commencé par inadvertance avant de devenir une véritable addiction, elle veut savoir, comprendre les mécanismes humains qui font qu’une décision est prise à la place d’une autre. Parfois, ça peut concerner le choix d’un vêtement, la gestion du domestique, qu’importe, elle avait soif de tout ce que le monde peut lui offrir de banalités.
Elle n’avait devant elle que des perspectives, des choix à faire, des filles à voir. Elle se sentait comme la dernière arrivée à une fête organisée pour elle, dont elle serait l’invitée d’honneur.
l’héroïne tour à tour dramatique et merveilleuse d’un film qu’elle parvient à se faire dans les moindres détails, assise devant sa tasse vide.
Alors que la lumière n’est pas de son côté et que la brume persiste, elle rayonne, émouvante et sublime de force retrouvée. Son regard avale le monde, elle s’allume une première cigarette et en soufflant la fumée loin au dessus de sa tête, les yeux vers le ciel qui fait de son mieux, elle ne peut retenir un rictus malicieux alors qu’elle fait le vœu de rechercher la merveille en chaque chose.
Il y avait un corps sous les décombres, il vibre, il crie, il n’est que puissance et envie.
On/Off.
L’épisode suivant : http://wp.me/p1NU35-bqP