[Critique] « Vesper Chronicles » : Un conte SF qui sème ses graines d’espoir

Dans un futur très (trop ?) proche, l’humanité vit un nouveau Moyen-Âge, soumise à une oligarchie retranchée dans ses « Citadelles ».

Le reste de la population vivote grâce à des micro-organismes génétiquement modifiés, ironiquement issus des mêmes expériences qui ont décimé l’écosystème mondial. Vesper, 13 ans, ne s’en laisse pas conter et vadrouille à la recherche de notre avenir. Son père l’accompagne via un drone qu’il pilote alité depuis leur maison.

Vesper Chronicles - Raffiela Chapman - SF - Rumble Fish Productions

Dix ans après Vanishing Waves (dispo sur Shadowz), voici le nouvel opus fantastique du duo Kristina Buozyte & Bruno Samper. Elle est une réalisatrice lituanienne renommée ; lui vient de la réalité virtuelle et des effets visuels. L’univers qu’ils nous proposent est sombre mais pas désabusé, baroque sans être maniéré, immersif en tous les cas. Certains plans semblent issus des tableaux de peintres flamands. Les costumes et la direction artistique sont de premier ordre et chaque recoin de l’image vibre d’une qualité rare : faire vivre le monde de Vesper Chronicles au-delà du champ de la caméra.

Vesper Chronicles - Raffiela Chapman - SF - Rumble Fish Productions

La Cité de l’enfant perdue

Quand notre héroïne rencontre une rescapée en provenance des Citadelles, la quête sensorielle se double d’un duel féminin inattendu. Et le film de se parer d’une myriade de références plus ou moins conscientes : si Marc Caro, Moebius et Miyazaki sont explicitement cités au générique, on pense aussi à David Cronenberg pour ses récents Crimes du Futur. La sécheresse du ton va de pair avec une profondeur émotionnelle bienvenue, comme en témoigne cette jolie scène où Camelia la survivante (Rosy McEwen) feuillette un bestiaire d’animaux disparus à Vesper (Raffiela Chapman) tout en mimant leurs cris, sous les yeux interloqués de la jeune fille.

Vesper Chronicles - Rosy McEwen - SF - Rumble Fish Productions

Ré-apprendre : c’est bien le mot d’ordre de ce conte trop violent pour les jeunes enfants, mais qui emmène les plus grands et leurs parents sur des chemins de traverse. Vesper Chronicles se laisse apprivoiser plus doucement que son affiche et sa bande-annonce ne le laissent imaginer. Ce qui pourra décontenancer le fan d’action décérébrée dans un mois d’août 2022 décidément peu propice au blockbuster bourrin. Avec son rythme élégiaque, c’est du côté du jeu vidéo que Vesper m’a fait louvoyer, en me rappelant le bio-hacking de Death Stranding et la sombre enquête des enfants de A Plague Tale.

Vesper Chronicles - Raffiela Chapman - SF - Rumble Fish Productions

Après Blood Machines (des mêmes producteurs), il convient de soutenir une science-fiction européenne asservie des diktats hollywoodiens. D’autant plus quand sa poésie politique est terriblement d’actualité. Et puis deux heures au frais dans une salle avec la musique de Dan Levy (césarisé pour la B.O. de J’ai perdu mon corps), ça ne se refuse pas.

Vesper Chronicles sort au cinéma le 17 août.

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