Crosta est un one man band portugais dont le premier album, I nous emmène à Lisbonne en 1755, lors du terrible séisme qui a secoué la ville, la région, le pays et une bonne partie de la péninsule ibérique
Lorsque j’étais enfant, j’étais fasciné par le pouvoir évocateur de la musique dans Pierre et le Loup. Dans ce conte mis “ambiancé” par le compositeur russe Sergueï Prokofiev, l’histoire est racontée au gré des instruments, chaque personnage s’en voyant attribuer un. Le grand père est le basson (ce fut pour moi l’occasion de découvrir ce qu’est un basson), Pierre, le quatuor à cordes, l’oiseau est la flute traversière, le canard le hautbois….et même si Gérard Philippe racontait l’histoire avec tout le talent de l’immense comédien qu’il était, la musique se suffisait à elle-même pour imager l’histoire.
Cette capacité à raconter une histoire sans paroles, c’est le défi que se lancent les créateurs de musique instrumentale et l’on reconnaît un bon disque à sa capacité évocatrice. I, le premier opus de Crosta, one man band portugais en est une éclatante illustration.
I is vaguely inspired by the 1755 Lisbon’s Great Earthquake: a display of Mother Earth’s power, a lesson about our fragility
Habillé d’un artwork rouge sombre sur lequel se découpe une barre rouge orangée menaçante (qui n’est autre que le titre du disque, I faisant logiquement suite à la démo baptisée quant à elle 0), le disque, très dépouillé, ne livre aucune indication sur son contenu. Idem pour le site internet de l’artiste, à peu près aussi dépouillé que la pochette de son disque (https://www.crosta.band). Crosta n’étant pas hyper bavard quant à sa création, le seul moyen d’en savoir plus est de se plonger dedans. Il vaut mieux se mettre en condition, car le voyage, s’il est envoûtant, mérite qu’on y consacre toute son attention. C’est à ce prix que la magie opère et que la musique vous transporte dans la cité de Lisbonne. Vous entendez le chant des marins, le bruit des vagues sur la coque des navires, les grondements lointains de la ville…et la terre qui tremble, la fumée suffocante des incendies, la mer déchaînée, la peur, les cris, la mort. Il y a tout cela dans I, et bien plus encore, pour peu qu’on y prête l’attention nécessaire.