La pénurie d’essence vous fait peur, vous roulez des heures à la recherche d’une station service, consommant le précieux carburant que vous savez devenu si rare? Vous croyez que c’est la merde ? Vous devriez lire la théorie des dominos pour voir ce qu’une pénurie d’essence pourrait vraiment engendrer…
La théorie des dominos est un livre d’anticipation écrit par Alex Scarrow. Si sa construction est assez moyenne son idée de départ est très dérangeante, encore plus quand la pénurie menace… Que se passerait-il si les pays « riches » étaient soudain privés de toute source d’approvisionnement de pétrole ? Et bien je peux vous dire que ce qui se passe en France cette semaine est bien éloigné du scénario catastrophe envisagé par Alex Scarrow en 2007.
Ce que raconte la théorie des dominos
La théorie des dominos envisage ce que pourrait devenir notre monde moderne si la menace d’une pénurie d’essence de plusieurs mois devenait réelle. Comment réagiraient nos gouvernants ? Comment utiliseraient-ils les réserves stratégiques de pétrole (ces réserves dont ont parle depuis le début de la semaine et dont cet article du Monde explique la finanité). Comment réagiraient nos voisins, nos collègues, nos amis et notre famille si cette menace devenait une réalité ? Voila le sujet de ce livre : le chaos engendré par une interruption brutale de l’approvisionnement en pétrole.
Le gouvernement (britannique en l’occurence, mais ça serait pareil chez nous) décide donc de stopper l’approvisionnement et d’utiliser ces fameuses réserves stratégiques pour approvisionner les service publics et plus particulièrement l’armée chargée de protéger les sites stratégiques et d’endiguer le chaos qui s’ensuit. Et bien vite le gouvernement et l’armée sont dépassés par les événements et tout s’effondre comme un château de cartes en moins d’une semaine. Plus d’eau potable, plus d’approvisionnement des villes en nourriture, plus de transports, plus de police…la merde noire. C’est froidement écrit, d’un réalisme à la Clancy et très documenté aussi et c’est ce qui est glaçant. Le gouvernement applique la procédure à la lettre, se coupe du monde et des réalités et se retrouve prisonnier de sa propre dialectique. C’est de la grande anticipation et la situation finale est de près ou de loin la fin de notre monde….
Malheureusement, le livre n’est pas à la hauteur de la situation car l’auteur prend deux décisions qui ruinent rapidement l’intérêt du roman.
– A court terme : en décidant de raconter les aventures individuelles des 4 membres d’une famille séparés par les évènements, du premier ministre britannique (les meilleurs passages, hélas peu nombreux) et d’un tueur mystérieux. Côté famille on a : les enfants à Londres (bien), la femme sur la route entre Manchester et Londres (inégal) et le père qui avait tout prévu sauf la date, essayant de quitter l’Irak accompagné d’un guide arabe, d’un prospecteur américain et d’une troupe de militaire anglais tous plus caricaturaux les uns que les autres (le guide est un sage, l’américain un bourrin et les militaires…des militaires). Cette partie en Irak est trop longue et pas vraiment intéressante, parce qu’elle ne colle pas au reste du récit. L’auteur perd du temps à raconter des trucs un peu subalternes et bâcle sa fin.
– A long terme, en attribuant le déclenchement de cette crise à une société secrète, genre Illuminati parce que la Terre est trop peuplée et l’homme trop dépendant au pétrole…comme la société est très secrète, on créée le personnage d’un tueur à gages envoyé pour faire le ménage, qui va croiser la route de la famille et en profiter pour expliquer pourquoi la société secrète agit ainsi…pas très fin.
Le roman se termine donc au bout d’une semaine de chaos par un épilogue cucul la praline où la gentille famille enfin réunie fuit Londres et se réfugie dans une communauté de gentils survivalistes qui l’accueille et décide d’attendre des jours meilleurs.
Ce qu’on ressent après l’avoir lu
C’est un roman réaliste et inquiétant, les scènes de chaos dans les villes font beaucoup penser aux films de zombies, mais on en a tant vu, des scénarios catastrophe de cet acabit que même si c’est très réaliste, la construction manque de peps et sans m’être ennuyé (c’est vrai que l’auteur sait ménager le suspens), j’ai rapidement trouvé que les pérégrinations des protagonistes sentaient le réchauffé.
Néanmoins, plusieurs années après sa lecture, ce livre est encore en moi et j’y réfléchis régulièrement, preuve qu’il n’est pas aussi mauvais que ça. J’ai surtout gardé mémoire d’un passage évoquant le nombre d’esclaves que nous devrions utiliser pour mener le train de vie que nous menons si nous n’avions pas l’énergie illimitée. On estime ainsi qu’un européen moyen utilise l’équivalent énergétique de 45 esclaves pour mener sa petite vie pépère…ça fait réfléchir, non?
Même si nous n’en sommes pas là, la précipitation des gens à aller tous remplir leur réservoir à la pompe pour continuer à utiliser leur voiture, dans un genre de comportement à la « après moi le déluge » ne laisse rien présager de bon sur la manière dont pourrait dégénérer la situation si les pénuries se prolongent. La solidarité de façade de ceux qui se disent « solidaire avec les grévistes » ne dure que tant qu’ils ne sont pas menacés ou plus simplement, tant que leur confort n’est pas vraiment menacé. La solidarité est un peu à géométrie variable ces derniers temps. On est solidaire avec la police après les attentats, mais on leur crache à la gueule pendant les manifs. On aime son prochain sur la place de la République mais on se bat avec lui pour avoir de l’essence…tout cela n’est pas très encourageant et montre surtout et encore que malgré ses beaux atours, l’homme reste un loup pour l’homme.
Les screenshot sont tirés de l’excellentissime Fallout 3 et je les trouve très à propos…