Qui mieux que Lemmy pour raconter Lemmy. Lemmy la légende, Lemmy l’homme aux 5OOO femmes, Lemmy le père du Speed Metal, Lemmy Mister Cool, Lemmy le rebelle éternel et surtout Lemmy le mec simple et honnête qu’on aurait tous aimé avoir comme pote, beau-père, cousin, coach de vie
Quand Lemmy est mort, je n’ai pas tout de suite compris l’espèce de béatification dont il a fait l’objet. Je n’avais jamais accroché à Motörhead, encore moins à Hawkind et n’étant pas versé dans le culte de mes idoles, j’ai trouvé ces réactions un peu exagérées. Ne parlons même pas de la grotesque statue érigée sur le site du Hellfest ou de tous ces groupes qui, se découvrant une passion soudaine pour le Speed Metal, se sont empressés d’ajouter une cover de « Ace Of Spade » à leurs setlist. Et puis, j’ai lu « La fièvre de la ligne blanche », l’autobiographie co-écrite par Lemmy Kilmister et la journaliste Janiss Garza en 2004 (vous le trouvez en VF chez l’éditeur Camion Blanc).
Lemmy en synthèse
On pourrait résumer le credo de Lemmy par trois affirmations : rester cool, ne pas faire de compromis, profiter de la vie. Et dans ces trois domaines, le leader de MOTÖRHEAD a fait un sans fautes. Il est donc logique qu’un grand nombre d’amateurs de Metal et de Rock s’identifient au personnage, le considérant comme une sorte de porte parole jusqu’au boutiste qui a survécu à tout et n’a jamais renoncé à aucun des plaisirs de la vie.
L’autobiographie du musicien est un livre de structure assez classique qui raconte chronologiquement la carrière de Lemmy. Son enfance sur une île galloise, son adolescence sur les routes, sa passion précoce pour la musique, carrière qu’il embrasse en grande partie parce qu’elle lui permet de baiser facilement. Suivent les années de vache maigre et de couch surfing, puis sa participation au groupe HAWKING pour laquelle il troque la guitare pour la basse. Viennent ensuite les années MOTÖRHEAD qui sont relatées sans rien omettre des grands moments, même s’il reconnaît bien volontiers avoir parfois perdu le fil, la vie d’un groupe de Rock se résumant à une longue suite de journées sur la route, concerts, soirées de fête, interviews et pince-fesse, un train-train duquel il est parfois peu aisé de se remémorer les détails saillants. Pourtant, malgré une consommation effrénée de stupéfiants (un médecin lui refusera une dialyse en lui expliquant que son organisme fonctionne avec une dose létale de drogues mais qu’il risque la mort si on remplace son sang empoisonné par du sang neuf!), Lemmy arrive à recoller les morceaux de sa longue carrière pour en relater les moments déterminants. Il nous gratifie aussi de quelques anecdotes qui valent leur pesant d’or. Des moments de délire total comme cette fin de tournée en Norvège où les roadies ont menotté et déshabillé le promoteur avant de le balancer sur scène et de le recouvrir de fromage fondu devant le public parce qu’il avait mis le groupe en retard à plusieurs reprises pendant la tournée. Des anecdotes savoureuses sur les artistes comme Randy Rhoads : “Mon plus grand souvenir de lui c’est qu’il était nul à chier au jeu Asteroïds et j’ai fini par le battre à ce jeu d’un bout à l’autre de l’Amérique” (MOTÖRHEAD ouvrait pour Ozzy sur la tournée Blizzard of Ozz). Un exemple parmi bien d’autre compte tenu du nombre d’artistes que Lemmy a côtoyé tout au long de sa carrière.
Dans un luxe de concision, le bassiste déroule sa vie, en évitant de tomber dans le panneau de l’auto-apitoiement, du déni ou du regret. Surtout, Lemmy ne s’étant jamais débarrassé de ses addictions, on échappe aux rituels passages consacrés à la désintox. Je comprends que la désintoxication puisse marquer un homme qui découvre à quel point il a pu être chiant et mettre sa vie en danger en étant addict, mais ces passages n’en sont pas moins lourdingues, d’autant plus qu’on les retrouve dans beaucoup de biographies et qu’ils fonctionnent toujours sur le même schéma.
La rockstar jette aussi un regard désabusé sur le star system et le music business. Il confie qu’il regrette d’avoir du renoncer à prendre des pots avec ses fans en devenant très célèbre mais il juge durement les fans jusqu’au boutistes qui se prennent pour lui, ainsi que ceux qui ont donné son prénom à leurs enfants, chiens, chats ou perruches. En synthèse, sur ce sujet comme sur tous les autres, Lemmy apparaît comme un mec vraiment humain. Ce mec ne s’est pas enfermé dans une tour d’ivoire. Qu’il n’a rien du gendre idéal mais tout du rebelle qui a fait en sorte de pouvoir vivre la vie qu’il s’est choisie, avec ses hauts et ses bas, mais sans jamais baisser son froc.
En 300 pages, ce bouquin réussit à faire aimer Lemmy. Ceux qui le connaissent déjà le respecteront encore plus, ceux qui le découvrent regrettent de pas l’avoir connu de son vivant.
Si vous avez la flemme de lire le livre, vous pouvez déjà vous payer une bonne tranche de bio avec le clip Murder One de Metallica (car n’oublions pas que contrairement à bien des groupes qui se sont découvert une passion pour Lemmy sur le tard, Lars Ullrrich était déjà fan de Motörhead avant de fonder Metallica, comme Lemmy le dit à plusieurs reprises dans sa bio).
Si vous voulez lire une bonne critique du dernier album de Metallica, je vous renvoie vers la page de notre ami Granny Smith (c’est un peu hors sujet, mais ça me fait plaisir d’en parler là) : Hardwired to self destruction vu par Granny Smith.