Dans l’Adepte Bleu, l’auteur britannique Piers Anthony donne ce qu’ils aiment aux amateurs de Science Fiction et aux fans de Fantasy. Le monde où se déroule l’aventure est en effet une double réalité existant simultanément sur deux dimensions. Phaze est un univers fantasy régit par la magie. Monde des créatures fantastiques (licornes, loup-garous, fées et lutins), il est dominé par les adeptes, de puissants magiciens qui se reconnaissent à leur couleur (le bleu, le blanc, le vert….comme dans le Seigneur des Anneaux). Cependant, contrairement aux mages de Tolkien ou David Eddings, êtres immortels chargés de réguler les forces de l’univers, chez Piers Anthony, les lanceurs de sorts sont des seigneurs locaux, qui règnent sur leur petit peuple et se font la guerre comme tout bon suzerain médiéval…Voila Phaze.
De l’autre côté du rideau dimensionnel, il y a Proton. Une cité industrielle et industrieuse, vivant sur ses mines, et où le système politique oligarchique permet à une minorité de vivre grassement du travail d’une foule d’esclaves. Ceux-ci vont nus, ne possèdent rien et ne valent rien. Ils ont cependant un moyen de s’élever et d’accéder au statut de citoyen en participant à des jeux pluridisciplinaires où s’affrontent les habitants de Proton. Là, à l’issue d’épreuves variées (lutte, musique, poésie, cuisine), le gagnant est affranchi et devient un citoyen.
Phaze et Proton cohabitent, chaque habitant de l’un ayant son double sur l’autre. Le passage entre les mondes n’est possible qu’à certains endroits et surtout pour les hommes dont le double a été éliminé. Mais dans ce cas, un habitant de Proton, un esclave par exemple, qui passerait la barrière des mondes récupérerait tous les pouvoirs de son double.
Notre héros est Stile. Sur Proton, c’est un esclave qui rêve des jeux. Pour gagner, certes, mais aussi parce que c’est la seule distraction offerte aux esclaves sur ce monde.
“Il marchait d’un air assuré et les autres lui témoignaient pour la plupart une subtile déférence. Quand il se déplaçait dans une direction donnée, la voie s’ouvrait commodément devant lui, par une heureuse coïncidence ; quand son regard croisait un regard, l’autre tête s’inclinait significativement. Il était un serf, comme tous les autres, nu et sans marque de supériorité physique ; en vérité, c’eût été le comble du mauvais goût que de lui accorder ouvertement de la considération. Et pourtant il était un géant, ici. Il se nommait Stile.
Stile mesurait un mètre cinquante et pesait cinquante kilos. Dans l’ancien parler, il eût mesuré quatre pieds, onze pouces, et pesé un quintal, ou huit stones ; ou encore quinze paumes et cent livres. Ses congénères mâles pouvaient le dépasser d’un demi-mètre et de vingt-cinq kilos.
Il était heureusement proportionné sans être exceptionnellement musclé ; bien de sa personne, sans être beau. Il n’accordait pas facilement son amitié et peu nombreux étaient ceux à qui il donnait le nom d’ami, car les avances l’intimidaient. Mais une immense vitalité remplaçait la chaleur humaine qui lui manquait.
Il arpentait la Salle de la Grille, à l’Annexe du Jeu, son endroit favori ; hors de ce lieu, il redevenait le mince personnage que les autres voyaient en lui. Il recherchait un adversaire à sa taille, mais l’heure n’était guère propice. Des couples occupaient les boxes dont la succession dessinait le périmètre sinueux de la salle, tandis qu’au centre se pressait une foule à la recherche de contacts. Un léger souffle d’air frais, délicatement parfumé, arrivait par les ouvertures du plafond et la lumière du soleil déployait sur le sol tout un jeu d’ombres.
Stile hésitait à se mêler à la foule, répugnant à cette promiscuité forcée. Il eût préféré que quelqu’un lui lançât un défi.”
Et puis un jour, poursuivi par un mystérieux ennemi, Stile passe la barrière entre les mondes et de l’autre côté, il est l’Adepte Bleu. Un magicien donc….et je ne vais pas tout te spoiler, mais le roman joue sur les contrastes entre les mondes et sur leurs points commun. D’un côté Stile doit gagner les jeux, ce qui donne lieu à des descriptions des épreuve vraiment intéressantes. De l’autre, il doit combattre un mage puissant qui veut annexer son domaine et accessoirement détruire l’univers de Phaze….et de Proton, puisque les deux mondes sont si intimement liés que la disparition de l’un entraînera celle de l’autre. Ce roman a initialement été publié sous forme de nouvelles dans la presse spécialisée. Le rythme ne faiblit jamais, et le jeu des miroirs, la variation des ambiances entre les lieux apportent quelque chose de neuf dans le propos. Et puis, pour une fois, les protagonistes sont dans un tout petit monde, ils ne passent donc pas des centaines de pages à l’arpenter (cf à peu près tous les romans de Heroic Fantasy, le Seigneur des Anneaux, la Belgariade et la Mallorée en tête).
Comble de bonheurs, cette saga est éditée par l’Atalante, donc tu achètes à la fois une belle histoire et un bel objet: l’adepte bleu sur le site de l’Atalante.