Watchmen, le chef d’œuvre d’Alan Moore et Dave Gibbons

Watchmen, un roman graphique formidable sur des justiciers humains et fragiles que l’on doit au duo Alan Moore & Dave Gibbons.

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Bonjour et bienvenue dans « un dernier livre avant l’apocalypse nucléaire », la chronique littéraire bimensuelle pour bien choisir ses lectures en attendant la mort dans d’atroces souffrances.

L’apocalypse nucléaire arrive et vous ne savez plus quoi lire ?

D’étranges ballons espions survolent les USA, et vous êtes en quête d’un bon bouquin ?

L’horloge de la fin du monde est à minuit moins une seconde et vous ressentez le besoin d’une lecture solide, puissante, et réconfortante ?

Pas de panique, nous sommes là pour ça. Cette semaine : Watchmen d’Alan Moore et Dave Gibbons.

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Watchmen est une série de comics en 12 épisodes parus chez DC Comics entre 1986 et 1987.

L’histoire se déroule aux USA en 1985, dans un contexte de guerre des blocs, et sous la menace d’une apocalypse nucléaire. Toute ressemblance avec l’époque actuelle étant purement volontaire, et même accentuée par mon trouble paranoïaque, ma dépression morbide, mes angoisses chroniques et ma phobie du rutabaga.

Techniquement, il s’agit d’une uchronie mêlant polar, science-fiction, et critique de la société.

(Une uchronie, c’est quand tu écris un récit de science-fiction totalement fictif et imaginaire dans les années 80, et qu’il décrit précisément notre réalité de 2023)

Alan Moore (auteur) et Dave Gibbons (dessinateur) mettent en scène un univers proche du notre, à ce détail près que les super-héros existent, qu’ils ont connu un succès populaire très important, puis ont été remis en cause avant d’être carrément interdits.

(Tiens tiens, comme de par hasard, exactement comme le rutabaga dans notre monde à nous !

bon ok le rutabaga n’est pas formellement interdit, mais il devrait l’être, n’est-ce pas ! Mais que fais le gouvernement  ?

je vous ai parlé de ma phobie ? )

L’histoire s’ouvre justement par la mort d’un de ces anciens justiciers, le Comédien. Rorschach, un autre des justiciers rescapés de cette époque, se donne pour tâche de mener l’enquête en solo (parce que Chewbacca n’était pas disponible). Et je m’arrêterai là hein, y a pas marqué Wikipédia.

Le Smiley emblématique du personnage du comédien, avec une tache de sang

L’ouvrage est fascinant à plus d’un titre.

Tout d’abord, il faut remercier Watchmen pour avoir rendu les super plus « matures ».

Non non, je ne parle pas de ta catégorie favorite sur PornHub. Je veux dire : plus adultes.

Avec Watchmen, les super-héros deviennent des êtres humains comme vous et moi, surtout comme vous, avec des problèmes de grandes personnes, des impôts, de l’arthrite, des doutes, des remords et des problèmes d’érection, et qui se posent des questions morales, et plus simplement des culturistes bodybuildés habillés en slips par-dessus leurs collants flashy qui sauvent des petites meufs en détresse et des gosses en péril au 36ème étage d’un immeuble en flammes pendant que le méchant débite son plan machiavélique en 16 chapitres pour bien anéantir la planète.

Questionner la morale, revoir ses actions au travers d’un prisme éthique, se demander si faire un peu le mal est nécessaire pour avoir le plus grand bien de tous : mais c’est le sujet du bac philo de 2023, ou c’est Watchmen ? Et surtout, cette question qui revient tout au long du bouquin, comme un leitmotiv :

« Qui garde les gardiens ? »

 

Pour ceux qui auraient mangé leur gaffiot : « Quis custodiet ipsos custodes ? est une locution latine attribuée au poète romain Juvénal ».

(Ah oui l’inventeur des vitamines, là : Si juvabien, c’est Juvénal).

Au passage, et c’est peut-être pas du Juvénal, hein, mais moi aussi j’ai d’autres questions qui me préoccupent :

– Qui dépanne les dépanneuses quand elles sont en panne ?

– Qui a conseillé la conseillère d’orientation ? (n’est-ce pas, Nekfeu)

– Qui enquête sur les commissions d’enquêtes sur le complotisme ? parce que c’est suspect, quand même.

– Pourquoi on n’a pas encore crée des ZADAD (ZAD à défendre) ?

Si des fois vous avez la réponse, contactez-nous !

 

Logo de la Serie Watchmen en Jaune sur fond noir

Mais Watchmen est bien plus qu’une énième histoire de super-héros tourmentés.

Watchmen est une œuvre formelle d’une richesse inouïe, qui révèle de nouveaux détails à chaque relecture. La preuve : je ne l’ai lue qu’une seule fois pour l’instant. Et bien, j’ai hâte de le relire pour vérifier que ce que je dis est vrai !

Watchmen pourrait être utilisé en tant que manuel pour répondre à la question « Comment bien raconter une histoire ? ».  Et même, « comment bien raconter une histoire complexe, avec de nombreux personnages et sur plusieurs époques, tout en restant lisible, agréable, distrayant, et même carrément addictif ? ».

Le récit est incroyablement dense et fourni, et présente une structure complexe au premier abord, qui est pourtant parfaitement accessible. Ce sentiment provient essentiellement du choix de la narration, non-linéaire, mais également d’autres expérimentations et tentatives pour raconter de manière originale : exercices de symétrie dans l’espace et dans le temps, histoires dans l’histoire, documents annexés en fin de chapitres …

Et pourtant l’intrigue reste claire, en grande partie aussi grâce au trait magnifique de Gibbons. Les pages fourmillent de petits détails, easter eggs et autres bonbons acidulés (par pitié, giflez-moi, je vous en supplie, je me supporte plus) qui se font écho tout au long du roman graphique et lui donnent cette cohérence et cette rigueur exceptionnelle.

Un souci du détail omniprésent que l’on doit au travail colossal de scénariste de Moore, qui sait exactement ce qu’il veut, où il veut, quand il veut, case après case, comme on peut le constater dans l’extrait de scénario annexé en fin d’ouvrage.

J’ai déjà eu l’occasion de dire tout le bien que je pensais d’Alan Moore, mais pas en ces lieux (Jérusalem est un roman qui m’a profondément marqué, et il est possible que j’en reparle un jour. J’y réfléchis. Si les rutabagas me laissent un peu tranquille).

Que voulez vous, j’adore lire des histoires d’A. Moore le soir, c’est mon côté romantique.

Bref, Watchmen est une histoire brillante, absolument captivante, et fascinante (j’arrête, j’ai plus de qualificatifs en -ante) qui sitôt refermée, nous fait dire : I want Moore !

Un livre à lire avant l’Apocalypse nucléaire ; mais tardez pas trop à le commencer quand même…

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Watchmen, Scénario Alan Moore, Dessins Dave Gibbons, Couleurs John Higgins, Trad. Jean-Patrick Manchette, DC Comics, 1986-87

Allez l’acheter chez votre libraire du village. Et s’il n’y a plus de librairie, c’est simple : ouvrez-en une.

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