Jean d’O, l’écrivain du bonheur, 5 ans déjà.

Cela fera déjà 5 ans, le 5 décembre prochain, que Jean d’Ormesson n’est plus. Celui dont la douceur évidente n’avait d’égale que la beauté de ses yeux bleus s’était éteint, au terme d’une longue vie où l’écriture autant que la lecture étaient reines. Il laissait derrière lui une œuvre conséquente et impeccable. Trop impeccable peut-être pour qu’un de ses livres ne sorte du lot et rentre dans la catégorie des classiques. Jean d’O écrivait sur l’Histoire, sur l’amour, et sur les histoires d’amour. Mais avant toute chose, il parlait de lui, de son enfance, de sa mère, de son époque et de son rang. Je suis nostalgique de ses passages télé, je suis triste de ne plus entendre sa voix fluette citer Chateaubriand, et je suis immensément jaloux de son érudition et de sa rhétorique.

Jean d'Ormesson

Jean d’Ormesson est né comte, d’un père propriétaire du château d’Ormesson et d’une mère propriétaire du château de Saint-Fargeau. Autant dire qu’il n’était pas destiné à écrire du rap en mangeant un grec et en fumant de l’herbe. Non pas qu’il n’en fut pas capable, si l’on considère la qualité de sa plume et son ouverture d’esprit. Mais son chemin de vie était, pour ainsi dire, tout tracé. Journaliste puis écrivain et philosophe, directeur du Figaro pendant un temps assez court finalement, il s’est consacré tout entier à comprendre le sens de l’existence et à transmettre son optimisme et sa joie de vivre. Sa littérature, bien qu’empreinte de nostalgie, est une gigantesque ode à l’amour et au bonheur.

« La naissance est le lieu de l’inégalité. L’égalité prend sa revanche à l’approche de la mort. »

Lorsqu’on lit la biographie de Jean d’Ormesson, on est parfois étonné par son parcours. Par exemple, il a une licence de lettres et une autre d’histoire, ainsi qu’une agrégation en philosophie, tout en ayant raté son bac une première fois. Autre anecdote, il était le benjamin de l’Académie Française à son élection, il en est le doyen à sa mort. Jean d’O fut l’un des rares auteurs à être publié dans la pléiade de son vivant, ce qui l’émouvra beaucoup. C’était aussi, à mon avis, l’homme de droite avec le plus d’idées de gauche. C’est pourquoi il fut apprécié par un très grand nombre de personnes de tous bords. Il avait la faculté de s’adapter parfaitement à son auditoire tout en conservant ses opinions et ses valeurs. Un vrai caméléon d’Ormesson.

Jean d’O est mort quelques heures seulement avant Johnny Hallyday, ce qui aura pour fâcheuse conséquence de faire passer les hommages qu’il méritait au second plan. Il avait pourtant conscience qu’un écrivain devait soigner son passage de vie à trépas, comme le prouve cette archive hallucinante :

Ainsi, Jean d’Ormesson n’a pas su suivre son propre conseil. Il est parti avec discrétion, sur la pointe des pieds. Mais résonnent encore en moi certains de ses textes, comme « le train de ma vie » par exemple :

Ou encore certaines de ses citations non écrites qu’il a pu prononcer, lors d’entretiens télévisuels, lesquelles on pourrait qualifier de punchlines aujourd’hui. Je vous laisse d’ailleurs avec celle-ci, qui est très inspirante et qu’il a dite au micro de l’excellent François Busnel :

« J’ai compris assez vite, je vous assure, que vouloir être heureux seul est une folie. Vous avez le droit d’être heureux, mais il vaut mieux que les autres le soient aussi. Il y a des gens que je méprise beaucoup, ce sont ceux qui sont indulgents avec eux-mêmes et cruels avec les autres. Il y a des gens que j’admire plus que tout, ce sont ceux qui sont durs avec eux-mêmes et doux avec les autres. »

Si les gens de droite étaient tous comme lui…

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