Après avoir respiré les effluves de sueur et de distorsion dans les caves marseillaises, direction Toulouse. Moins rugueuse que la cité phocéenne, mais tout aussi agitée, la ville rose a un cœur qui bat au rythme d’un punk à la fois cérébral, nerveux et frondeur. Ici, pas besoin de sable chaud : les décibels suffisent à faire fondre le bitume.
CATHEDRALE : les maîtres du trottoir mental
On commence avec CATHEDRALE. Si t’as jamais croisé leur nom, c’est que t’écoutes trop Inter. Le groupe, qui aligne album sur album comme d’autres les clopes sur le perron, navigue entre post-punk anguleux et pop sombrement jouissive. Ils font penser à un Wire qui aurait bu trop de vin rouge chez des anarchos gentils. C’est propre, c’est sale, c’est urgent. Et c’est toulousain jusqu’au fond des boots.
Leur dernier LP te donne envie d’écrire des pamphlets en majuscules sur fond de basse nerveuse. Fonce.
Régine! : exclamation obligatoire
Avec un nom qui sent le club de province et les refrains criés dans des caves humides, Régine! (oui, avec un point d’exclamation) crache son punk franc, direct et sans effets spéciaux. C’est du “fin du monde” en deux minutes vingt, sans tunnel de guitare. Ils balancent leur rage avec le sourire du dernier jour. Punk de bistrot, punk de trottoir, punk de fin de mois. Toulouse les mérite. J’ai poncé ce titre comme jamais. Surtout, j’ai eu la chance de les interviewer. Si tu veux aller plus loin.
URGE : le spleen version punk
URGE (qu’on a interviewé aussi), c’est le versant plus introspectif de la scène. Leur musique te colle au mur doucement, puis t’embrasse les tempes avec des nappes froides et des guitares acérées. Enregistré à Capitol Studio (oui, Toulouse sait faire pro), leur son rappelle les heures brumeuses de Joy Division, mais sans mimétisme. C’est dense, c’est beau, c’est noir comme un local de répète sans chauffage.
Et les autres ?
Parce que Toulouse, c’est aussi un écosystème punk qui suinte la crête et les amplis qui craquent :
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Punish Yourself : toujours debout, toujours en fluo. Le punk indus de l’apocalypse.
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Dirty Fonzy : pour les nostalgiques du punk californien mais avec des baskets Décathlon.
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The Booze Brothers : punk celtique toulousain, si t’as envie de boire des Guinness en pogotant avec des punks en kilt.
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Condkoi : le hardcore qui cogne juste, avec des textes qui font plus mal qu’un tir de LBD.
Où ça crie, où ça vibre : les antres punk de Toulouse
Un mouvement sans scène, c’est juste un post sur Bandcamp. Et à Toulouse, la scène, elle est bien réelle, transpirante, autogérée, énervée, mais accueillante (sauf si tu dis pain au chocolat, cette hérésie), un peu comme un chien punk qui grogne mais veut juste des câlins.
Voici les spots où le punk toulousain prend corps :
Le Ravelin / Itinéraire-Bis – Ancien squat devenu lieu associatif, c’est le QG du punk DIY. Tu poses ton fessier sur une chaise en palettes, tu bois une mousse à prix libre, tu pogotes à 40 cm du groupe. Le rêve, sans file d’attente.
Le Cri de la Mouette – Une péniche pour les concerts énervés. Oui, le punk sur l’eau, c’est possible à Toulouse. Et c’est plus stable qu’un squat sous expulsion.
Les Pavillons Sauvages – Lieu autogéré, utopie concrète. Ici, chaque concert est une manif joyeuse, chaque soirée une lutte dans la bonne humeur (en plus demain il y a TRAMHAUS).
Le skatepark Le Petit organise aussi des event punk via l’association Copain Coping.
Tu peux aussi regarder les tourneurs et labels comme Bitume Rugueux, Growing older et Noiser. Les calendriers des concerts sont dispos sur Distorama et Concert ou pizza.
Toulouse, ce n’est pas que les saucisses
C’est une scène qui grogne sans forcément rugir, qui avance en bande, discrète mais déterminée. Ici, les caves, les bars et les assos continuent de faire tourner la roue, sans trop se soucier de la hype. Le punk y est vivant, ancré, artisan. Pas besoin de chercher un “mouvement” : il est déjà là, en action, sans manifeste.