Rentrée littéraire, faire le bon choix

La rentrée littéraire bat son plein et comme d’habitude, à la veille des élections présidentielles, les chiffres des ventes sont effarants. Des auteurs de talent se creusent les méninges et martyrisent leurs claviers pour alimenter nos bibliothèques d’œuvres essentielles autant que durables et nous lecteurs, nous ruons sur des livres politiques. Ceux-ci sont des programmes électoraux bourrés de promesses intenables, des pages de mièvreries faussement proches de la réalité des Français, des pavés indigestes qui tomberont indubitablement dans une obsolescence méritée une fois les élections passées.

Alors oublions ces torche-culs d’opportunistes de tous bords et faisons la paix avec la littérature ! Près de 600 livres sont parus pour cette rentrée littéraire, parmi lesquels se cachent des pépites. Voici ma liste de lectures. Faites votre choix, ne gaspillez plus votre temps et votre argent pour des hommes et des femmes de pouvoir, consacrez-les aux dealers de rêves ainsi qu’aux autrices et auteurs de savoir.

Enfant de salaud de Sorj Chalandon chez Grasset

Sorj Chalandon est journaliste et écrivain. Il nous livre, dans Enfant de Salaud, l’histoire de son père, mythomane invétéré, qui a longtemps fait rêver son fils au gré de ses mensonges. Il lui raconte avoir été instituteur, professeur de judo, ferronnier ou encore vitrier, avant de devenir un grand résistant de la seconde guerre mondiale, puis agent secret et chef de la CIA. Mais la vérité est beaucoup plus sombre que cela et je vous invite vivement à la découvrir dans ce beau roman autobiographique.

Sorj Chalandon

Blizzard de Marie Vingtras aux éditions de l’Olivier

Pour un premier roman, Marie Vingtras fait une entrée fracassante dans le petit monde des auteurs de cette rentrée littéraire. Elle nous emmène dans le Grand Nord de l’Alaska. Bess, qui connait peu la difficulté de vivre dans ce milieu hostile, lâche quelques secondes la main du « petit » pour renouer ses lacets. Celui-ci disparait dans le blizzard et c’est ici que commence ce thriller des grands espaces, avec des personnages énigmatiques dont on découvre le passé au fur et à mesures des recherches laborieuses et des pages dévorées.

Marie Vingtras

Klara et le Soleil de Kazuo Ishiguro chez Gallimard

Klara est un robot humanoïde dont le destin est de devenir l’amie d’enfants fragiles. Elle attend patiemment dans la vitrine du magasin, au sein d’une Amérique futuriste et polluée. Quand enfin une famille « l’adopte », elle a pour mission de devenir la confidente de Josie, une jeune fille malade. Klara va rapidement toucher du doigt la noirceur de la nature humaine, les mensonges, les hypocrisies et la folie. Ce nouveau roman de Kazuo Ishiguro, à l’écriture toujours aussi limpide, nous interroge sur notre relation aux autres, à la vie et à la société. Il y a du Georges Orwell entre les lignes.

Kazuo Ishiguro

Au printemps des monstres de Philippe Jaenada chez Mialet Barrault

Jaenada revient sur un fait divers survenu dans la France des années 60. Le petit Luc, 11 ans, est enlevé à Paris. Son corps est retrouvé le lendemain dans une forêt de banlieue. Pendant des semaines, un corbeau signant « L’Étrangleur » envoie des lettres immondes et outrancières à la police, à la presse, mais également aux parents du jeune martyr. Les forces de l’ordre finissent par arrêter le coupable présumé qui finira sa vie en prison. Mais justice a-t-elle été rendue ? L’habit fait-il le moine ? Les monstres sont-ils toujours ceux que l’on croit ? L’auteur nous dévoile ses 4 années d’enquête, nous expose sa vérité avec l’écriture haletante qu’on lui connait bien.

Philippe Jaenada

« La différence entre littérature et journalisme, c’est que le journalisme est illisible et que la littérature n’est pas lue » disait déjà en son temps Oscar Wilde. C’est la sensation que j’ai eue, 130 ans plus tard, en tombant sur les ventes de bouquins en août-septembre 2021. Les polémistes, éditorialistes et politiciens prennent une place démesurée sur l’échiquier de la rentrée littéraire. C’est à mon sens navrant et je remercie AOW de me laisser cette tribune pour le dire. Le livre est un objet trop précieux pour être dévoyé par des chantres du prestige en mal de reconnaissance. À bon entendeur…

1 Comment

  • Hadrilenain
    Hadrilenain

    “Près de 600 livres sont parus pour cette rentrée littéraire”. On met le doigt sur un vrai problème…

    Répondre

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