Une série célèbre le cinquième centenaire du voyage qui a changé le monde. L’œuvre partait d’une bonne idée mais se retrouve hélas trop limitée par son format.
Il y a pile 500 ans donc, le 6 septembre 1522, un navire débarque à Sanlúcar en Andalousie. À son bord, 18 marins rescapés, épuisés, accompagnés de leur capitaine Juan Sebastián Elcano. Ils sont les premiers êtres humains à avoir effectué le tour de la planète en un même voyage. De ce périple fou, la série Sans Limites n’en fait hélas qu’une reconstitution très sage.
Cette expédition de circumnavigation (mot compte triple) fut, on l’a tous appris à l’école, dirigée par le navigateur portugais Fernand de Magellan. La présentation du personnage et de ses enjeux est assez sommaire : bafoué par sa royauté, il se tourne vers l’ennemi espagnol pour financer sa flotte. Malheureusement, le récit ne fait que survoler cette trahison et on est bien en peine d’en saisir tous les enjeux : impériaux, religieux et surtout économiques. Magellan est donc très déterminé, sa femme très enceinte et très triste, le voyage peut commencer. On savoure tout juste une jolie scène de chant désespéré des marins dans un troquet, avant l’amer largage des amarres.
C’est que cette production espagnole ne s’encombre pas de détails, ni de psychologie : les marins andalous sont rustres mais bons, tandis que les portugais sont montrés comme les méchants futurs colonisateurs. Cela ne risque pas d’attiser la “guerre” entre les deux pays qui se chamaillent encore pour savoir à qui revient l’honneur de ce tout premier tour du monde.
La mise en scène de tous les épisodes, impersonnelle, est confiée à l’hollywoodien Simon West (Tomb Raider, Expendables 2). Un comble : la géographie n’est pas son fort puisqu’on se demande régulièrement à quelle étape du voyage se trouve la flotte et les combats maritimes sont plutôt mal chorégraphiés. La mort de Magellan (spoiler vieux d’un demi-millénaire) ne fait pas non plus l’objet d’un soin particulier, entre flashbacks habituels et sursaut de Madame restée à la maison, le regard par la fenêtre.
Si l’on retire les génériques et le récapitulatif, chaque épisode de Sans Limites dure moins de 30 minutes. La mini-série se regarde donc en à peine 3 heures, ce qui est bien peu pour une telle histoire. Un format “long-métrage” aurait eu les honneurs d’une construction dramatique approfondie. Vous l’aurez compris : on est loin de l’ampleur d’un 1492 : Conquest of Paradise tourné par Ridley Scott pour les 500 ans du voyage de Christophe Colomb.
Pourtant, tout n’est pas à jeter par-dessus bord ! Magellan et Elcano sont interprétés avec un savoir-faire tout professionnel par Rodrigo Santoro (300, Westworld) et Álvaro Morte (le Professeur de La Casa de Papel). Les costumes et la musique font le boulot et l’on prend presque un malin plaisir au comique involontaire de certaines scènes, quand par exemple la caméra s’attarde en gros plan sur un personnage que l’on veut nous montrer très menaçant.
Pour se plonger véritablement dans l’histoire de Magellan, je ne saurais que trop vous conseiller la lecture de sa biographie par Stefan Zweig. Un maître du genre pour un livre prenant que j’ai découvert et lu cet été totalement par hasard, avant même d’entendre parler de cette série.
Loin des dragons et des elfes issus de mondes fantastiques à la mode, Sans Limites a au moins le mérite de terminer l’été sur une aventure humaine et européenne.