Sylvain Tesson a accompagné la petite équipe de Vincent Munier observer le félin au pelage hivernal. C’est le sujet de son dernier livre.
« J’ai réellement une sale gueule » se réjouissait Cendrars à la découverte de la photo qui allait orner ses Poésies complètes. C’est à croire que la nature récompense ceux qui sont partis à l’aventure. Comme si l’inaction condamne monsieur tout le monde à un physique lambda et octroie une gueule à ceux qui vivent furieusement. Cendrars et Kessel, notamment, ont fait partie de cette tribu. Tesson œuvre à les rejoindre.
La panthère des neiges est le récit d’une expédition au Tibet à laquelle Tesson a lui-même participé. Le quotidien narré met en place un contexte aux réflexions de l’écrivain. De chapitre en chapitre, d’aphorisme en aphorisme, l’auteur se sert de chaque aspect du voyage pour établir son propos. Il y est question d’amour un peu, d’écologie beaucoup. Le désabusement quant à l’espèce humaine est une sorte de leitmotiv et l’érudition de Tesson, un peu redondante par moment, se met au service du bouquin.
Il est évidemment de bon ton d’être méfiant vis-à-vis du best-seller d’une rentrée littéraire. Toutefois, dans le cas présent, on a affaire à un vrai bon ouvrage. Si le discours quant au sublime de la nature et à la stupidité inhérente à l’humanité est un chouïa rébarbatif sur la fin, Tesson offre le témoignage d’une aventure. Une aventure sous la forme d’un voyage initiatique où l’on prend conscience qu’il y a du sublime dans ce monde et que l’on fait partie d’un tout. « Il faudrait se tourner résolument vers la nature » avait écrit Beckett, une gueule lui-aussi.